Plus de 7000 exposants issus d’organismes publics et privés, bénéficiaires de financements européens pour des projets en lien avec les nouvelles technologies digitales, s’étaient donné rendez-vous au Centre des Congrès de Lisbonne. L’ICT 2015 devait être le support de promotion des objectifs de l’Union européenne en matière d’économie digitale. Il a également offert de fructueuses opportunités de networking à ses participants.
Dès les premiers mots d’ouverture, la Commission européenne a annoncé la couleur : les technologies numériques sont en train de transformer l’économie européenne en profondeur. Du transport de marchandises à l’éducation, en passant par les services à la personne, ce sont tous les pans de notre société qui seront touchés par l’évolution vers l’économie digitale. De même que le moteur et l’électricité ont entraîné les changements vers des sociétés industrielles puis de service, les technologies digitales vont créer une nouvelle « Industrie 4.0 » pour Günther Oettinger, Commissaire européen pour l’Economie numérique.
C’est pourquoi, d’ici 2016, l’Union européenne souhaite s’insérer rapidement dans ce changement et mettre en place un marché digital unique. Cependant, celui-ci ne peut exister sans une coopération étroite entre partenaires publics et privés, mais surtout sans des investissements dans des projets ambitieux. Par cette stratégie, l’Union européenne entend s’imposer comme leader de l’économie digitale dans le monde.
Une transition digitale encouragée par la Commission européenne
Parmi les projets financés par la Commission et exposés durant la conférence ICT 2015, on a pu découvrir une multitude d’idées et de dénominations autant improbables que futuristes. Les termes les plus récurrents ont été « smart cities » (villes intelligentes), « 5G », « digital skills » (compétences digitales), « Big data » ou encore « objets connectés », entre autres. Les meilleurs projets ont été récompensés par les étudiants présents durant la conférence : ils reflètent la diversité des thématiques couvertes par l'Union européenne.
Notamment, l’Human Brain project (projet sur le cerveau humain) crée une réelle relation de proximité entre recherche sur des technologies numériques intelligentes inspirées de notre structure neurologique, et développement de technologies permettant de soigner les maladies du cerveau. Concernant l’éducation, le projet No one left behind a recours à la programmation de jeux vidéos par les élèves dans un but pédagogique, et Monarch est un robot qui éduque les enfants. Ceux-ci font écho à la « Code week », la volonté de l’Union européenne de favoriser l’apprentissage de compétences digitales. Enfin, en phase avec l’actualité brûlante du moment, on a pu voir le projet USEMP et sa technologie favorisant le contrôle de ses données personnelles en ligne par l’utilisateur.
Qu’est-ce que le « marché digital unique » prôné par la Commission Juncker ? La création d’un marché unique est le fondement de l’Union européenne depuis 1957. Ce marché s’est peu à peu élargi, au fil des traités européens, à d’autres domaines que l’économie. La création d’un marché digital unique entre dans cette dynamique. Il vise à supprimer les dernières barrières qui entravent la libre circulation du commerce entre les Etats membres. Mais, au delà de ses potentiels effets positifs sur l’économie européenne, la création d’un marché digital unique aurait des conséquences bien plus larges en termes d’éducation, d’accès au service public, de protection des données personnelles en ligne ou de gestion de notre environnement naturel.
Quid des effets sur notre société ?
L’un des enjeux principaux du développement de l’économie digitale est sa répercussion irréversible sur l’état de notre société. Cette question a régulièrement été au centre des conférences qui se sont déroulées lors de la conférence ICT 2015. Participants et exposants se sont interrogés sur la direction à prendre concernant le développement des nouvelles technologies. Celles-ci doivent-elles nous accompagner ou nous remplacer dans l’exécution de nos tâches quotidiennes ? Que penser de l’avancée du recours à la robotique dans le monde du travail, de la santé, de l’éducation, voire même de la gouvernance en termes d’évolution du marché de l’emploi et de responsabilités sociales ? Le langage informatique deviendra-t-il le prochain langage universel ? Et comment ne pas être aveuglé par tous les bénéfices économiques que nous font miroiter les technologies digitales, au risque de détériorer notre tissu social ?
La conférence ICT 2015 a mis en avant la progression et les investissements entrepris par l’Union européenne en faveur de la création d’une économie digitale. Mais face aux intérêts économiques évidents qui motivent cette politique, les contrecoups sociétaux apparaissent encore flous et ne semblent pas être anticipés. Si le développement d’une économie digitale est entrepris au niveau européen, il appartiendra pourtant aux Etats membres, au niveau national, d’accompagner la transition sociétale que la mise en place d’une telle économie va engendrer.