UE : la coopération transfrontalière menacée ?

6 Juin 2014



Les résultats des dernières élections européennes montrent une certaine animosité envers la politique européenne et place ainsi les territoires transfrontaliers dans un avenir incertain. En est-on bien sûr ? La montée des mouvements populistes et eurosceptiques sont-ils alors un défi pour les espaces transfrontaliers ?


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Les faits sont irréfutables : les mouvements populistes et eurosceptiques ont accru leurs influences au sein de la politique européenne. Mais au lieu de se demander pourquoi certains européens ont donné leurs voix à ces partis politiques, il faudrait plutôt s’interroger sur les réels impacts de cette tendance politique dans la gouvernance européenne et notamment dans sa coopération territoriale. 

Forts d’actions citoyennes locales, les territoires transfrontaliers ont connu deux progressions majeures. Une financière, par l’avènement de programmes européens, tel que le programme Interreg financé par le Fonds Européen de Développement Régional (FEDER). Et une politique, car depuis la fin des années 1990, la politique européenne favorise l’effervescence d’instances de coopération transfrontalière telles que les Eurorégions et Eurodistricts, considérées comme les laboratoires du projet européen.

Mais aujourd’hui, les financements accordés aux projets transfrontaliers et les timides volontés de mettre en place une juridiction transfrontalière pourraient être limités par la montée des partis populistes et nationalistes. Cependant, cette montée des extrêmes, bien que dangereuse dans le cadre national, aura un impact limité au niveau européen et transfrontalier. Ceci pour deux raisons qui semblent majeures. D’une part, les partis politiques majoritaires au sein du Parlement européen restent les partis de droite (Parti Populaire Européen) et de gauche (Alliance Progressiste des Socialistes et Démocrates). Ces partis ont encouragé un dynamisme en faveur des régions transfrontalières par des supports financiers (Interreg, Instrument Européen de Voisinage et de Partenariat), politiques (Politique Européenne de Voisinage, Stratégie Europe 2020…) et institutionnels (Eurorégions, Eurodistricts, Euroinstituts…) qui sera difficile à abattre par les eurosceptiques.

D’autre part, les espaces transfrontaliers sont des produits de faits locaux. Il ne faut pas oublier que la coopération transfrontalière est née et réside dans l’action citoyenne, de volonté de coopérer de part et d’autre d’une frontière pour dépasser ses effets et d’en tirer un bénéfice commun. Les transfrontaliers sont les premiers à reconnaître que la fermeture des frontières et le repli sur soi engendreraient des conséquences néfastes. 

La coopération transfrontalière : absente dans l’esprit des européens ?

Le taux d’abstention aux élections européennes (52%) reste certes stable par rapport aux élections de 2009, mais il montre encore une fois combien les citoyens européens se sentent éloignés des préoccupations européennes. Mais alors, la coopération transfrontalière est-elle dans l’esprit des européens ? 

On peut se le demander… Pourtant, les espaces transfrontaliers sont dotés d’un dynamisme pro-européen. La Mission Opérationnelle Transfrontalière (MOT) rappelle ainsi que « dans les territoires transfrontaliers, les politiques nationales et européennes convergent ; ces territoires expérimentent des services transfrontaliers à la population et aux entreprises, et une véritable citoyenneté européenne, renforcée par la diversité des cultures nationales et régionales. » Ce dynamisme pousse à penser que l’Europe vit et continuera à vivre notamment par ces laboratoires européens.

A titre d’exemple, l’Eurorégion des Carpates (comprenant la Hongrie, la Slovaquie, la Pologne, la Roumanie et l’Ukraine) permet malgré la crise ukrainienne, de développer des programmes de coopération transfrontalière liés au transport, à l’environnement et au tourisme. Ainsi les espaces transfrontaliers survivent aux mouvances politiques mais il semble que nous les oublions trop souvent…

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Annika Niel
Franco-allemande mais avant tout citoyenne du monde, je raffole des thématiques liées aux relations... En savoir plus sur cet auteur