Linda Linney, Mark Ruffalo et Orlando Bloom, acteurs dans Sympathy for Delicious
L’histoire était alléchante. Dean, alias Delicious D, ancien DJ talentueux et paraplégique, vit dans sa voiture au milieu d’un camp de SDF. Dépressif et hargneux, il découvre un beau jour qu’il a un don de guérison. Le prêtre qui s’occupe des sans-abris le persuade d’utiliser ce don pour aider les malades démunis, jusqu'à ce que l’argent des donations aiguise l’appétit des deux personnages. Pourtant, le réalisateur ne parvient pas à faire un film à la hauteur de cette idée intriguante.
Marc Ruffalo est un bon acteur. Il a fait beaucoup de grosses productions inintéressantes, mais ses rôles dans Eternal Sunshine of the spotless mind, Shutter Island et The kids are alright témoignent de son talent. Il sait par exemple être drôle et mystérieux à la fois. Mais il ne sait pas encore faire de films. Sympathy for Delicious n’est pas désagréable à voir et peut être drôle par moments. Ce n’est pourtant pas un bon film. Sa faiblesse ne vient pas d’un manque de vision d’ensemble, le film possède une certaine cohérence. Le problème vient plutôt de son manque d’ambition : il hésite entre le film loufoque et la réflexion morale, il ne s’assume pas comme comédie ou drame existentiel.
L’idée de base n’est pas mauvaise : un DJ paraplégique affublé d’un don de guérison, mais qui ne peut se soigner lui-même. A cela s’ajoute une réflexion sur la religion, en particulier la notion de miracle et son utilisation. Mais le sujet n’est pas pris à bras le corps. Le personnage principal, Dean, reste trop égoïste et dépressif pour être intéressant dans les relations qu’il tisse avec les autres. Le système de personnages est présent mais ne fonctionne pas à cause de ce caractère mal défini. Dean est par ailleurs montré comme un être gentil, alors que ses problèmes sociaux sont souvent évoqués à l’écran. Son caractère se construit dans les extrêmes, mais l’image ne cesse de se contredire. Le personnage reste ainsi plat, sans existence.
De la même manière, le personnage du prêtre qui instrumentalise Dean, joué par Mark Ruffalo, est simplifié à l’extrême. Son ambiguïté vis-à-vis de l’argent des donations est transformée en un simple appât du gain, trop vite repenti. On sent aussi que Mark Ruffalo a du mal à se diriger lui-même. L’histoire subit le même sort que ses personnages : elle traîne en longueur, sans construction classique ni expérimentations. Elle fonctionne par à-coups, parfois drôle et entraînante, parfois ennuyeuse et stérile.
De la même manière, le personnage du prêtre qui instrumentalise Dean, joué par Mark Ruffalo, est simplifié à l’extrême. Son ambiguïté vis-à-vis de l’argent des donations est transformée en un simple appât du gain, trop vite repenti. On sent aussi que Mark Ruffalo a du mal à se diriger lui-même. L’histoire subit le même sort que ses personnages : elle traîne en longueur, sans construction classique ni expérimentations. Elle fonctionne par à-coups, parfois drôle et entraînante, parfois ennuyeuse et stérile.
Contrairement à d’autres mauvais films, on ne peut pas dire que l’histoire s’est construite indépendamment de l’image. Comme pour le système de personnages, on a l’impression que l’utilisation de la caméra forme une unité cohérente, mais sans prise de parti réelle. Le générique attire le regard, des images de ville défilent sous nos yeux, la texture n’est pas trop lisse, les couleurs ont une teinte jaune : le film semble afficher le style des films indépendants, connu mais témoin d’un recherche esthétique. Puis les contre-plongées se multiplient et font signe vers une perception biaisée de la réalité, celle de Dean, enfermé dans son fauteuil et ses pensées noires. Mais rien ne demeure sur la durée : la caméra devient brouillonne, les champs contrechamps classiques se mélangent à des zooms arrière maladroits.
Christopher Thornton, scénariste et acteur principal, et Mark Ruffalo ont voulu raconter une histoire de manière honnête, ils sont tombés dans des banalités. Trop personnel (les deux auteurs sont amis et le premier est paraplégique) par rapport à l’ambition esthétique affichée, le film ne peut trouver sa place dans la sensibilité du spectateur. Un sujet comme cela, étrange et sentimental, aurait eu besoin d’une force de création beaucoup plus conséquente. On espère que le prochain film de Mark Ruffalo sera plus ambitieux.