Royaume-Uni : Republic, le mouvement qui voulait dissoudre la monarchie

Julia Rodriguez
13 Août 2013



Le « Royal baby » est né, vive la monarchie ! La popularité des Windsor est à son apogée, enfin c’est ce que l’on pourrait croire… Dans l’ombre, des opposants, menés par le mouvement Republic, s’insurgent contre l’ordre monarchique établi. Analyse de ces « antis » dont on ne parle pas.


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Le 27 juillet dernier, le petit George, bébé royal, a fait son apparition dans le cercle fermé des Windsor. La Grande-Bretagne s’enflamme alors toute entière. Ne nous y trompons pas… En marge des évènements, certains s’emploient à gâcher la fête, ou tout du moins, à proposer une alternative à la royauté. Les anti-monarchistes ne sont jamais loin et veillent avec assiduité. Depuis plusieurs années, ils ont comme crédo de se placer systématiquement à contre-courant des grands évènements royaux, et comptent bien rallier à leur cause le plus grand nombre, voire même finir par faire l’unanimité.

Un poids historique lourd

La nature de la Constitution britannique est très particulière. Il s’agit d’une Constitution non écrite (totalement différente de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen en France), constituée d’un ensemble de textes, de traités qui, siècles après siècles, ont créé les différents principes et lois qui régissent la vie politique en Grande-Bretagne. Cependant, ils ne sont pas regroupés dans un seul document de référence.

Cela a pour principale conséquence le fait que les fonctions de la Couronne ont beau n’être que symboliques en pratique, elles existent réellement de manière théorique. Par exemple, le souverain est chargé de la nomination du Premier Ministre ou encore de la signature des traités internationaux. La monarchie a tout de même permis l’instauration d’une certaine stabilité et continuité du régime. C’est une des raisons pour lesquelles, les Britanniques y sont très attachés. Malgré les apparences, ils sont loin de faire l’unanimité.

Republic, un mouvement « antimonarchiste » motivé et connecté

Au cœur de la Grande-Bretagne, une communauté d’irréductibles républicains résistent encore et toujours à la « monarchie-mania » qui semble avoir conquis le reste du pays. Ils ont nommé leur mouvement non-gouvernemental « Republic » et  comptent bien rallier à leur cause la majorité de ceux qu’ils refusent d’appeler « sujets », mais « citoyens ». A ce jour, ils comptent plus de 16 000 adhérents et le chiffre va en augmentant au fur et à mesure des coups médiatiques orchestrés par les Windsor. Leur site internet est particulièrement bien documenté. Il s’inscrit parfaitement dans la modernité du XXIe siècle, avec toute la batterie de profils sur les réseaux sociaux, l’importance qu’ils donnent à la médiatisation permanente de leur mouvement, et la réalisation de nombreux sondages en ligne.

Leurs principaux objectifs s’articulent principalement autour d’une base de données et d’actualités qu’ils utilisent pour inonder les médias nationaux afin de proposer une voie alternative. Par ce biais-là, ils tentent de faire émerger une nouvelle façon de voir la famille royale, déterrant ainsi les affaires pas toujours reluisantes et qui portent un coup à l’image apparemment sans tâches de celle-ci. A travers les médias, mais aussi le travail de lobbying auprès des membres du gouvernement, ils essaient à tout prix de faire pression auprès des organes les plus influents de l’appareil politique et ainsi d’occasionner un changement radical. On peut, à ce propos, observer une liste non négligeable de députés ayant signé le « Serment d’allégeance » qui officialise leur support au mouvement Republic. Non sans surprise, ces différents députés font partie des nombreux partis politiques qui composent le Parlement britannique (Conservateurs, Travaillistes, Libéraux-Démocrates ou encore les Verts), s’unissant ainsi autour d’une même problématique.

Plus concrètement, Republic organise surtout des « contre-évènements » plutôt originaux et incongrus comme le boycott du mariage princier en 2011. Ils avaient alors fait signer une carte de vœux avec ces mots : « Bien que nous vous souhaitions beaucoup de bonheur dans votre mariage, nous sommes opposés à votre droit à une fonction officielle par héritage et nous ferons tout ce qui est possible pour que le successeur de la reine soit choisi par le peuple britannique et lui rende des comptes ». Cette manifestation en marge du mariage princier, pourtant tant médiatisé, a recueilli une forte attention médiatique avec les caméras du monde entier braquées autour de lui.

 

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Republic s’est fait également connaître par l’exposition d’affaires telles que la proposition du ministre de l’éducation Michael Gove, en 2012. Le ministre avait proposé de lever de nouvelles taxes pour offrir un yatch à la Reine. Republic se mobilise également dans les écoles, les universités, à travers l’organisation de conférences, de débats publics autour de cette thématique.Ce mouvement ne manque pas de motivation et de ressources pour enlever les œillères qui empêchent les Britanniques de se rendre compte qu’un autre système politique est possible.

Il existe à ce jour douze monarchies constitutionnelles en Europe. Stabilité, continuité et tradition sont, bien sûr, les raisons essentielles de cette longévité. Au-delà de cette similarité, il y a aussi la recrudescence de mouvements anti-monarchistes à l’image de Republic. Prenons l’exemple de l’Espagne. Depuis 2007 déjà, des voix s’élèvent et s’organisent : jeunes républicains, groupes indépendantistes catalans et depuis peu le journal COPE (organe de presse catholique donc traditionnellement plutôt en faveur de la monarchie).

Récemment, les scandales de corruption, qui ont éclaboussé la monarchie espagnole, ont entrainé une hausse des mouvements de protestation. C’est ainsi qu’en avril dernier une manifestation antimonarchistes a pris place à Madrid, regroupant des milliers de mécontents. Certes, ces contestations sont moins développées et organisées que Republic, mais elles font tout de même entendre leur voix en surfant sur la vague des nouveaux médias (Internet, réseaux sociaux) et en mobilisant largement les citoyens.

C’est donc sur le format de « mini révolutions » populaires que se construisent ces groupuscules, utilisant les statistiques d’opinions défavorables envers les monarchies comme principales bases de données. En Espagne comme en Grande-Bretagne, l’instauration d’une République est le but final à atteindre. Une République construite sur le modèle de la France, avec une Constitution écrite et précise, un chef de l’Etat élu au suffrage universel par les citoyens et la mise en place d’institutions qui auraient à cœur de promouvoir plus de transparence au sein de l’appareil d’Etat. Ces revendications républicaines sont en parfaite harmonie avec ces protestations : la prise en main du destin des citoyens par les citoyens, l’envie de faire entendre leur voix dans les rues, mais également dans les urnes pour choisir qui sera propulsé à la plus haute fonction de l’Etat.

Et les Britanniques dans tout ça, qu’en pensent-ils ?

Le Journal International a rencontré l’un des sujets de Sa Majesté, Olliver, originaire de Bath (sud-ouest de l’Angleterre). A l’instar de Republic qui posait comme question au cours de ses nombreux sondages « Voudriez-vous avoir la possibilité d’élire votre chef d’Etat si cela était possible ? », Olliver répond que « personnellement, je trouverais cela plutôt bénéfique pour le peuple de choisir leur chef d’Etat mais pas forcément maintenant. La Reine est un important symbole de notre pays mais je pense que si elle venait à mourir cela pourrait être une bonne opportunité de se diriger vers un autre modèle politique, une République par exemple. ». Ce commentaire fait notamment référence au pourcentage de 57% de britanniques qui pensent qu’il y aura encore un monarque dans cinquante ans. Pour une ferveur nationale que l’on croyait homogène, c’est un peu faible !

Concernant la ferveur et l’attachement qui règne autour de la monarchie, il nous affirme : « J’ai le sentiment qu’il y a un attachement particulier pour la Couronne, mais principalement pour des raisons symboliques et avec le poids de la tradition car c’est une part importante de notre Histoire, de notre héritage. Mais je ne ressens pas personnellement d’attachement envers la famille des Windsor, juste un respect raisonnable pour la Reine. »

Entrons à présent dans le vif du sujet, à savoir les critiques principales concernant l’argent que reçoit la famille royale et qui provient des taxes levées dans le pays, Olliver s’insurge : « Il ne devrait pas y avoir de contribution financière de la part des citoyens pour la famille royale, car j’estime qu’elle ne contribue pas à hauteur raisonnable dans ma vie de tous les jours. J’accepte de contribuer financièrement pour l’entretien des routes, la construction d’écoles ou pour des services nationaux essentiels comme la police, mais devrais-je vraiment financer la construction d’une maison assez grande pour accueillir la future famille de Kate et William ? Je ne le crois pas ! ».

Il conclut par « Notre pays est en pleine récession et chaque centime devrait être utilisé pour l’amélioration de la situation économique ou de notre système de santé par exemple, et non pas pour entretenir le train de vie des Windsor ! » Un avis plutôt mitigé donc, pour une institution qui ne fait, finalement, l’unanimité qu’auprès des touristes. 

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1.Posté par Coralie Do le 14/08/2013 09:16
Il est très maladroit de comparer la Constitution britannique à la DDHC de 1789, qui ne revêtent en aucun cas un rôle similaire .. En termes de pertinence, il faut opposer la Constitution britannique à notre Constitution de 1958 ayant mis en place la 5eme République !
Sinon, article intéressant qui a le merite de faire entendre la voix de ceux que l'on tait généralement !

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