Elle a fait le bonheur des uns, et le malheur des autres.Le 1er août 2014, la cour constitutionnelle Ougandaise a rejeté la loi anti-homosexualité, surnommé « kill the gays bill » qui avait été officiellement signée le 24 février dernier par le président Yoweri Museveni et votée par le parlement en décembre 2013. Ce dernier avait justifié sa démarche en s’appuyant sur des arguments scientifiques : « Selon une étude, cette pratique est un acte contre nature et la plupart des homosexuels sont en réalité des hétérosexuels motivés par des actes de prostitution ».
C’est en 2009 que La première loi anti-homosexualité avait été introduite en Ouganda, mais depuis le 24 février, une personne pouvait risquer une peine maximum d’emprisonnement à vie pour « homosexualité aggravée ». Ces mesures avaient dès lors allégé le projet de loi initial de 2009 qui prévoyait la peine capitale pour tout acte homosexuel. Selon le président il était important d’empêcher la promotion de l’homosexualité impulsée par les pays de l’ouest.
Un autre argument avait été engagé lors du vote de cette loi ; celui de la protection des enfants, considérés comme vulnérable à un recrutement sexuel. Parmi les défenseurs de la loi anti-homosexualité, on retrouve des partisans du président Museveni, mais aussi des leaders religieux catholiques, tel que l’évêque Charles Wamika, ayant appelé dans une de ses déclarations à un génocide de la communauté gay.
Les détracteurs de cette communauté ont ainsi rapidement déchanté le 1er août 2014 lorsque la cour constitutionnelle du pays prit la décision de rejeter la loi anti-homosexualité; celle-ci fut décrétée illégale, car le quorum requis au moment du vote parlementaire n’avait pas été atteint. L’annulation de cette loi fut alors saluée par la scène internationale tel que l’ONU, ou encore Barack Obama qui avait affirmé son opposition aux mesures prises par Museveni et menacé le pays de tout partenariat américano-ougandais.
UN VENT DE LIBERTE DANS LA VILLE D’ENTEBBE
Le rejet de la loi anti-homosexualité a ainsi accompagné le 9 août dernier la troisième gay-pride du pays, au jardin botanique de la ville D’Entebbe. En 2012, la première gay-pride du pays avait connu de violente altercations avec les forces de l’ordre, mais cette année, l’évènement reçu l’aval de la police ougandaise qui assura la sécurité du cortège.
« Nous sommes ici pour marcher pour tous ceux qui ne peuvent pas marcher, qui ont peur de marcher » déclara Kimbugwe, militant LGBT, « nous sommes ici pour célébrer nos droits ». Plus de 500 personnes se sont ainsi réunis lors de cet évènement, arpentant fièrement le drapeau arc-en-ciel, symbole de la communauté gay. Parmi le cortège, on pouvait distinguer des inscriptions tel que « Il y a des gays en Ouganda » ou encore « Je suis gay et chrétien».
UNE VICTOIRE EN DEMI-TEINTE POUR LA COMMUNAUTE LGBT
Toutefois, les défenseurs de la loi anti-homosexualité décidèrent de passer outre la décision de la cour constitutionnelle et de poursuivre leur combat pour la pénalisation de l’homosexualité. Depuis le 5 août 2014, plus de 200 membres du parlement Ougandais signèrent une pétition pour rétablir la loi anti homosexualité et le 10 août dernier, Peter Nyombi, membre du parti présidentiel National Resistance movement, décida de faire appel à la haute cour du pays afin de rejeter la décision de la cour constitutionnelle.
Le 12 août 2014, ces derniers obtinrent finalement gain de cause puisque le porte-parole du parlement annonça qu’un nouveau vote concernant la loi anti-homosexualité devrait être prochainement mise en place. Toutefois, dans un dernier communiqué, le président Museveni semble avoir modéré sa position puisqu’il conseilla aux membres parlementaires de son parti de ne précipiter aucune décision : « la loi n’est pas une priorité pour le développement du pays, même s’il était nécessaire de protéger l’institution familiale ».
L’avenir de la loi anti-homosexualité en Ouganda reste ainsi incertain et c’est donc une demi-victoire pour la communauté LGBT ougandaise. Rappelons que depuis la mise en place de cette loi, de nombreuses personnes décidèrent de quitter l’Ouganda afin d’échapper aux persécutions homophobes.
En avril dernier l’ONG Human Rights Watch rapporta une augmentation notable des abus subis contre les personnes homosexuelles, ainsi que l’arrestation de 17 personnes en raison de leur orientation sexuelle. Rappelons enfin que le cas de l’Ouganda n’est pas un cas isolé, puisque l’homosexualité reste aujourd’hui réprimée dans plus de 80 pays dans le monde et reste condamnable à mort dans pas moins de 7 pays.