Orania: ces irréductibles qui résistent encore et toujours à la mixité raciale

13 Mars 2013



Retour sur Orania, enclave sud-africaine où l'apartheid a encore son mot à dire.


Orania: ces irréductibles qui résistent encore et toujours à la mixité raciale
L’Afrique du Sud en 2013. Desmond Tutu l’avait déclarée comme la nation arc-en-ciel. Depuis la fin de l’apartheid en 1991, l’Etat donne un exemple bien réussi du vivre ensemble pacifique entre les populations dites « blanches », « colorées » et « indiennes ». Pendant que le gouvernement du président Jacob Zuma doit se défendre contre des reproches de corruption et de misère économique, la diversité des populations est déjà considérée comme s’il n’y avait rien de plus naturel. Seule une petite enclave – située dans la région du désert du Karoo - refuse de s’adapter à la République moderne et multiculturelle.

Orania – A première vue, un village de 700 habitants qui n’éveille aucun soupçon. Cependant, l’enclave ne s’est pas développée par hasard. Ses habitants partagent deux points communs : leur peau blanche et leur fierté de la culture Afrikaner, les Sud-africains blancs d’origine néerlandaise, française, allemande ou scandinave, défendant l’idéologie de l’État du peuple.
Orania a été fondée par Carol Boshoff, le gendre de l’ancien Premier ministre sud-africain, Henrik Verwoerd. En 1991, lorsque la plupart des Sud-africains fête la libération de Nelson Mandela, les premières élections multiraciales et la fin de l’apartheid, Boshoff et sa famille créent la micro-république boer.
Le village n’est autre que la propriété privée de la société anonyme Vluytjeskraal Aandelbrook. Si l’on souhaite emménager à Orania, il faut acheter leurs actions. Le conseil administratif oranien délibère alors et décide, sur la demande de l’intéressé, s’il peut acquérir un terrain. Les habitants choisis n’ont pas seulement leur couleur de peau et leur culture en commun, ils partagent également un certain style de vie: ils exercent leurs travaux domestiques eux-mêmes, sans employer de salariés noirs. Cette vie quotidienne correspond à la conception de l’État du peuple, l’idée d’une région autonome, où la population afrikaaner veut préserver sa langue, l’afrikaans, et ses coutumes. Économiquement, Orania est dépendante des petites entreprises sur place, de l’agriculture et du tourisme. Les Afrikaners séparatistes ont même leur propre monnaie, l’Ora.
Ce qui pourrait poser des problèmes à l’administration d’Orania c’est son nombre d’habitants extrêmement réduit. Ainsi, des villages voisins ont proposé une fusion, catégoriquement refusée par les Oraniens.

Pas racistes, mais "chez eux"

Il est vrai que l’enclave attire aussi des résidents qui ont vécu de mauvaises expériences avec des Africains à la peau noire. Cependant, les Oraniens soulignent qu’ils ne sont pas racistes mais veulent être chez eux. Bien qu’il faut éviter de tirer des conclusions hâtives en déclarant Orania – sans recherche poussée sur le sujet - comme une enclave de l’extrême-droite, l’attitude ignorante à l’égard de la population noire et les victimes de l’apartheid est critiquable, voir choquante. Entre autre, l’exposition au musée local sur l’ancien Premier ministre, Hendrik Verwoerd, aussi connu comme l’architecte de l’apartheid, illustre un non-respect des plus pesants.

Notez


Manuel Leidinger
Je suis Manuel, étudiant ERASMUS en Droit à l'Université Lyon II. Je viens d'Allemagne mais j'ai... En savoir plus sur cet auteur