Nouvel an chinois : en selle pour l'année du cheval !

Traduit par Marion Enert
25 Février 2014



Le nouvel an chinois est la plus importante des fêtes chinoises, au cœur des traditions du pays. Toutefois, mis à part en Chine ou dans les quartiers chinois, peu de monde sait vraiment de quoi il est question. Découverte.


© Reuters
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Le nouvel an chinois, basé sur le calendrier lunaire, se déroule sur quinze jours. Ceci représente les vacances les plus importantes en Chine, la plupart des chinois les passant en famille. Bien que de nombreuses coutumes et traditions soient communes, tel que le traditionnel grand « ménage » précédant le début des festivités, certaines différences régionales persistent, laissant la question sur l’identité des Chinois sans réponse.

Cette nouvelle année lunaire, qui vient tout juste de débuter, est celle du cheval de bois. Le nouvel an chinois se base sur le cycle de douze ans du calendrier lunaire, créé sous la dynastie Han (206-220 av. J.C.). Ce calendrier associe chaque année à un animal du zodiaque chinois : le rat (2008), le bœuf, le tigre, le lapin, le dragon, le serpent, le cheval, la chèvre, le singe, le coq, le chien ou le cochon. Ce système attribue également un des cinq éléments (terre, eau, feu, bois et métal) à chaque animal.

Traditions et superstitions

En réalité, le nouvel an chinois commence bien avant les festivités du réveillon, notamment avec le balayage et le nettoyage de sa maison pour « chasser le mauvais sort ». Une fois la maison nettoyée, des lanternes, des papiers découpés et des rouleaux de papier où sont marqués ‘福'(fú, bonheur) ou ‘财'(cái, trésor) sont accrochés.

Lors de ma préparation pour mon séjour à Harbin où la famille d'une amie chinoise m'accueillait pour le nouvel an, j'ai acheté deux esprits de Pékin, des fruits frais et huit barres de chocolat à leur offrir. En Chine, le nombre d'offrandes est important, la langue chinoise étant une langue phonétique. Par exemple, dans les croyances populaires, offrir quatre présents peut être assimilé au mauvais sort, le chiffre quarte ‘四'(sì) sonnant comme la mort ‘死'(sǐ). Le chiffre huit ‘八'(bā) est lui assimilé à la prospérité et à la richesse. Les nombres impairs sont généralement considérés comme moins prospères, les croyances locales déclarant que les bonnes choses devraient toujours se répéter.

Alors que les chiffres huit et neuf ont une connotation positive, il existe également des chiffres porte bonheur en accord avec les signes du zodiaque. L'année du cheval, les chiffres deux, trois et sept sont considérés comme particulièrement chanceux.

Le retour au bercail

Pour l'occasion, la plupart des chinois sont sur la route pour aller retrouver leur famille. Le nouvel an chinois commence avec la nouvelle lune lors du premier jour de la nouvelle année et se termine lors de la pleine lune suivant les quinze derniers jours (le jour de la Saint Valentin cette année). C'est le pic des départs en voyages.

Tous les guides de voyage déconseillent cette période de l'année aux touristes à cause de l’affluence de personnes sur les routes, dans les gares et les aéroports. Dès que les chinois commencent à rentrer chez eux, la ville entière se vide alors.

Le Nouvel An

Lors du réveillon du nouvel an, de grands repas de familles sont organisés comprenant une grande variété de plats : du poulet, du porc et du poisson. Respectant un proverbe chinois, '年年有魚' (nián nián yǒu yú, chaque année il y a du poisson), un peu de poisson est donc laissé de côté dans l'assiette et est ensuite placé dans la cuisine pour la nuit. Ces restes de poisson sont une métaphore représentant l'espoir d'avoir un surplus d'argent pour l'année. Des enveloppes rouges (红包, hóng bāo) contenant de l'argent sont offertes. Tout au long du nouvel an, on peut entendre et voir des pétards un peu partout dans les rues, et la plupart des chinois font des feux d'artifices lors du réveillon. Le lendemain du réveillon, les familles restent généralement chez elles ou vont visiter les leurs. Le jour du nouvel an, les petits-enfants rendent traditionnellement visite à leurs grands-parents. Les jours qui suivent, les gens se retrouvent en plus grand comité pour boire, manger et discuter. Ma famille d'accueil a combiné la visite des amis au tourisme et m'ont emmenée voir le festival de sculpture sur glace et neige de Harbin ainsi que son concours international de sculpture sur glace.

 
Crédits Photo -- Katrin Heilmann/ Le Journal International
Crédits Photo -- Katrin Heilmann/ Le Journal International

Dans les villes au sud de Harbin, les défilés du nouvel an sont très populaires. Ces défilés étaient au départ organisés par les bouddhistes et les taoïstes qui les utilisaient à des fins de prosélytisme. Aujourd'hui, ces origines religieuses sont reléguées au second plan, les aspects commerciaux et le divertissement ayant pris le dessus. À l'un des plus gros défilés de Pékin, au parc de Ditan (地坛), des foules de familles entières profitent des stands de nourriture (viande ou poisson grillés) tout en regardant les performances des comédiens, danseurs, chanteurs et acrobates. Les enfants sautent sur les trampolines, posent ou sont portés sur les traditionnelles chaises à porteurs pendant que leurs parents les prennent en photos.

Le festival des lanternes

Le nouvel an chinois se conclut avec le festival des lanternes lors de la première pleine lune du nouveau calendrier lunaire. De nos jours, les chinois mangent quasiment tous des 元宵 (yuán xiāo, boulette de riz gluand) en famille en admirant les lanternes. Pendant ce festival, on peut admirer de nombreuses variétés de lanternes, telle que la fameuse lanterne dragon, dans l'un des parcs de Chengdu.

Bien que les traditions soient au cœur du nouvel an chinois (certaines assez superstitieuses), la Chine ancienne a été quasiment effacée derrières les façades flamboyantes des gratte-ciel. Suite à la fureur de la Révolution culturelle, détruisant de nombreux trésors nationaux; le soutien de Deng Xiaoping au socialisme, tout en conservant les caractéristiques nationales, a été le point de départ de la rapide modernisation et du boom des constructions immobilières du pays. Toutefois, aujourd'hui, cet effacement des traditions, l'un des héritages de la Révolution culturelle, continue de hanter la Chine, malgré la vitesse de sa transformation économique qui reflète la création d'une Chine nouvelle.

L'identité chinoise actuelle est complexe. Il y a de très fortes tendances régionalistes, observables à travers les différentes coutumes, notamment par rapport à la nourriture. Par exemple, le Yang Tsé sert de frontière entre la région du nord et sa cuisine à base de nouilles et la région du sud qui a une cuisine à base de riz. La religion n'arrive pas non plus à jouer son rôle unificateur, la commercialisation du pays ayant pris le dessus et menaçant d'éroder les traditions, comme au parc Ditan. La religion a été écartée par le régime, ce qui a, au lieu d'unifier, mené à des agitations au Xinjiang et au Tibet notamment, où des groupes nationalistes demandent leur indépendance.

Parallèlement, les leaders chinois ont pour vocation d'unifier ces régions, notamment en parlant du Japon et du conflit qui les oppose au sujet des îles Diaoyu/Senkaku. La sur-médiatisation de la très controversée visite du premier ministre japonais Abe au sanctuaire Yasukuni est un bon exemple de cette tentative de diriger l'attention des chinois vers le problème japonais. Ainsi, la véritable motivation du gouvernement chinois irait bien plus loin qu'une simple volonté de contrôler le nationalisme ou d'encourager un sentiment anti-japonais national. Ce comportement aurait plutôt pour vocation de créer un fort sentiment d'unité au sein d'une Chine si diversifiée et plutôt divisée.

Année du cheval, année de guerre ?

L'année du cheval est traditionnellement associée à la guerre. Voici des exemples de différentes années du cheval où la Chine a été impliquée dans une guerre : 1979, les plus importantes batailles de la guerre sino-viêtnamienne; 1942, guerre sino-japonaise; 1930, guerre civil chinoise; 1894, défaite de la guerre sino-japonaise et 1858, seconde guerre de l'opium.

À l'inverse, la Chine a toujours souligné l'importance de son rôle dans la paix mondiale en tant qu'apport de stabilité et maison mère de l'économie mondiale. Cependant, les récents mouvements nationalistes, accentués par le développement de ce sentiment anti japonais, poussent les observateurs à s'inquiéter : la Chine va-t-elle tenir ses promesses ? Ou bien cette rivalité historique va-t-elle prendre une part plus conséquente dans les politiques étrangères à venir ?

En dépit des différentes réponses qui peuvent être apportées à cette question, l'année du cheval de bois, également seconde année du mandat du président Xi Jinping, promet d'être intéressante.

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