Merkel, dame de fer ou mère des peuples ?

10 Décembre 2012



Angela Merkel a été réélue triomphalement à la tête de la CDU (Union chrétienne-démocrate) le 4 décembre. Un score qualifié de cubain par la presse allemande, alors que la chancelière peut plus que jamais espérer se voir confier un troisième mandat.


Affiche du spectacle Blonde Republik Deutschland
Affiche du spectacle Blonde Republik Deutschland
« Bin weg » (« Je suis partie »). C’est le mot qu’Angela Merkel a laissé en quittant son bureau de la chancellerie. Déboussolés, deux attachés parlementaires tentent de former un citoyen lambda à la succession. Cette situation rocambolesque est mise en scène par le Distel Kabarett dans sa pièce Jenseits von Angela (Après Angela), qui fait rire tous les soirs un public friand de politique dans un des quartiers touristiques de Berlin.

Ce cabaret touche en posant la question suivante : si « Angie » n’était plus là, qui la remplacerait ? Réélue triomphalement à la tête de la CDU avec 97,94% des suffrages le 4 décembre, celle que l’on surnomme parfois la « dame de fer allemande » a su évincer ses concurrents potentiels en douze ans de présidence du parti, dont sept en tant que chancelière. Elle peut ainsi espérer se voir confier un troisième mandat après les élections générales du 22 septembre prochain.

Son challenger social-démocrate, Peer Steinbrück, ne suscite guère d’enthousiasme, même dans les rangs de son parti. Critiqué pour les sommes pharaoniques qu’il demande pour chacune de ses conférences, l’ancien ministre de l’Economie n’est crédité que de 50% d’opinions favorables. Quant à elle, la chancelière bénéficie selon une étude Infratest d’une popularité de 68%. Un engouement qui pourrait être dû à son habile gestion de la communication, qui en a fait en quelques années une figure rassurante. Ses partisans vont jusqu’à la considérer comme une « Mutti », une mère capable de protéger le pays des ravages de la crise économique.

Si Merkel reste populaire, son parti l’est moins. Il a perdu ces dernières années certains de ses bastions lors des élections régionales. C’est le cas de la Rhénanie du Nord-Westphalie, land le plus peuplé, du Bade-Wurtemberg, ou encore de la ville de Stuttgart, tombée aux mains des Verts en octobre. La dame de fer allemande, déclarée « femme la plus puissante de la planète » cinq fois en six ans par le magazine Forbes, mène une politique d’austérité très critiquée en Europe. Sa politique sociale reste insuffisante, alors que l’Allemagne est un des rares pays d’Europe à ne pas avoir de salaire minimum. Les inégalités se sont creusées, et la part de travailleurs pauvres est en augmentation constante. La part de travailleurs gagnant moins des deux tiers du salaire médian est passée de 15 % à 22,2 % entre 1995 et 2006 selon une étude réalisée par l'Institut pour le travail et la qualification en 2007.

Mais peut-on voter pour la « Mutti » sans voter pour la « dame de fer » ?

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Laurène Perrussel-Morin
Ex-correspondante du Journal International à Berlin puis à Istanbul. Etudiante à Sciences Po Lyon... En savoir plus sur cet auteur