Du district à la Maison Blanche : le long chemin d’une voix
Source : Ldjackson.net
Tout se joue autour du chiffre 270. Le chiffre de la majorité. Chaque Etat américain possède un certain nombre (plus ou moins élevé en fonction de la population) de grands électeurs. Ces grands électeurs sont élus par les citoyens américains âgés de 18 ans et plus. Leur nombre varie selon le nombre de districts auquel sont ajoutés deux sénateurs. Par exemple le plus grand Etat américain, la Californie, possède 55 grands électeurs (53 districts et 2 sénateurs) alors que l’Alaska n’en possède que 3. Ces grands électeurs se regroupent dans un collège électoral, formant 538 membres au total. Le système électoral américain fonctionne sous un système de « the winner takes it all ». Le candidat qui gagne un Etat remporte l’ensemble des grands électeurs de cet Etat. Par exemple si Obama obtient la majorité en Californie, il emporte les 55 votes pour lui. Les Américains élisent donc ces grands électeurs qui éliront pour eux le président et le vice-président ; c’est le principe de démocratie indirecte.
On comprend alors mieux le but des candidats : emporter la majorité des grands électeurs qui est de 270. Concernant les toss-up states (c'est-à-dire les Etats où le résultat du vote reste encore très indéterminé), plus la population est importante plus leur vote est crucial pour les candidats.
Vote électoral vs vote populaire : perdre mais gagner
Avec un système comme celui des Etats Unis, on se retrouve avec deux types de votes : le vote électoral, celui qui aboutit grâce aux grands électeurs, et le vote populaire, celui qui aboutit grâce au vote de la population. Les résultats de ces votes devraient en théorie être les mêmes. Mais ce n’est pas toujours le cas. Certains présidents américains ont pu gagner bien qu’ils n’aient pas obtenu la majorité des votes populaires. C’est le cas de George W. Bush Jr en 2000 qui a obtenu 271 votes électoraux contre 266 pour Al Gore, alors que 50 992 335 Américains avaient voté Al Gore contre 50 455 156 pour Bush. Ce cas exceptionnel s’était déjà présenté trois fois auparavant : John Quincy Adams (1824), Rutherford B. Hayes (1876) et Benjamin Harrison (1888).
L’importance de l’Etat fédéral
Avant les élections, les candidats sont au courant des tendances politiques de chaque Etat. La Californie a toujours voté démocrate alors que le Kansas est profondément républicain. Obama peut donc considéré qu’il possède déjà 55 votes grâce à la Californie. Mais ce n’est pas le cas de tous les Etats. Des toss-up states, tels que l’Ohio, la Floride, la Pennsylvanie, l’Illinois, le Colorado et le Nevada, ne votent pas toujours pareil. Le nombre de grands électeurs peut donc aller à l’un ou à l’autre des candidats. Les sondages accordent 201 votes pour le couple président/vice-président Obama/Biden et 206 a Romney/Ryan, mais 131 votes des toss up states restent indéterminés.
« Est-ce que mon vote compte ? »
Beaucoup d’américains se posent la question de l’importance de leur vote. Pourquoi voter si c’est le collège électoral qui a le dernier mot ? En réalité, tout dépend de l’Etat dans lequel le citoyen vit. Par exemple, Romney est en train de gagne l’Utah a 70%, quoi qu’il arrive il emportera l’Utah. Le poids du vote d’un Américain y vivant sera évidemment moindre comparé à celui d’un citoyen du Nevada. Il est aussi important pour un américain de voter, quel que soit son Etat, pour permettre au candidat de connaitre l’orientation de l’Etat, si les démocrates gagnent la Californie à 51 % contre 49% ce n’est pas pareil que de la gagner à 70% contre 30%.
L’abstention très élevée : un calcul complexe
Ne pas être persuadé que son vote compte augmente le taux d’abstention. En 2008, environ 4 Américains sur 10 n’avaient pas voté (43% d’abstention par rapport à 20% en France). Mais le taux d’abstention ne se fait pas ressentir grâce au système du collège électoral.
Les raisons de cette abstention sont diverses. Selon le site américain d’information Real Clear Politics, 23 % des Américains qui ne votent pas se disent trop occupés, les deux tiers des non-votants ne croient pas en l’influence de leur vote et beaucoup d’entre eux ne sont pas naturalisés.
Le Président américain n’est pas considéré comme représentant la population mais les Etats d’Amérique. Quant à elle, la population est représentée par le Congrès. Une nuance qui pèse dans le vote.
Le Président américain n’est pas considéré comme représentant la population mais les Etats d’Amérique. Quant à elle, la population est représentée par le Congrès. Une nuance qui pèse dans le vote.
Par ailleurs, les taux d’inflation étasuniens ne sont pas comparables aux taux français. Aux Etats-Unis, ces taux calculent le nombre de votants parmi toute la population américaine en âge de voter alors que la plupart des pays calculent l’abstention en se fondant uniquement sur la population inscrite sur les listes électorales. C’est pourquoi les taux d’abstention des Etats-Unis sont toujours plus élevés que les taux d’abstention européens par exemple.
Les SuperPacs : corruption et fragilisation démocratique
Les SuperPacs fragilisent encore plus le vote des citoyens. Créés en 2010, ils permettent aux géants de l’économie, entreprises ou personnalités, de financer de manière illimitée la campagne d’un présidentiable. En théorie, ce financement doit se faire indépendamment de la politique. Mais les citoyens ne voient plus l’intérêt de leur vote face à la puissance des SuperPacs. Les SuperPacs favorise la corruption et fragilise la démocratie, c’est l’argument démocrate. Ils permettent aux candidats d’être plus proches de la population, c’est l’argument républicain. Un sujet de polémique aux Etats-Unis, qui départage une fois de plus républicains et démocrates.
Malgré l’abstention, la corruption naissante et la complexité du système, la plus vieille démocratie au monde n’est pas prête de simplifier le système électoral.