Irlande : Arthur Guinness’ Day ou la fête des brunes pintées

27 Septembre 2013



Depuis 2009, chaque 26 septembre, l’Irlande fête l’Arthur Guinness Day et célèbre de la même manière son plus illustre entrepreneur. Visite d’une cave à ciel ouvert le temps d’une soirée.


Crédits photo -- Sasko Lazarov/Photocall Ireland
Crédits photo -- Sasko Lazarov/Photocall Ireland
17h59 sonnent sur l’industrieuse Dublin. C’est à 17h59 que  tout commence le 26 septembre en Irlande. C’est l’heure où les pintes s’emplissent et se vident en cherchant à débrouiller, dans cet incessant va-et-vient de verres qui s’entrechoquent, le mystère du quatrième ingrédient qui fit le succès d’un petit entrepreneur de Kildare.

Car c’est en 1759 que tout a commencé pour Arthur Guinness. Fort des 100 £ que lui a légué son parrain Mgr Price, l’archevêque de Cashel, c’est en 1759 - pour une rente annuelle de 45 £ - qu’il signe le bail de 9 000 ans qui lui confère la gestion des 16 000 m² de la future usine de Saint James’s Gate.

Actuelle propriété de Diageo, la petite entreprise, aujourd’hui arrivée à maturation, réside toujours sur ses terres originelles. Et c’est toujours en secret que ses employés continuent de brasser un breuvage dont le goût unique et incomparable ne se retrouve qu’en Irlande. Amère et épaisse, la Guinness reste en effet inégalée et l’on dit que seule l’eau irlandaise sied à sa production.

Aujourd’hui servie dans plus de 100 pays, celle dont on dit que le contenu vaut bien l’apport calorique d’un repas complet triomphe dans la catégorie poids lourds. Elle a depuis longtemps écrasé son concurrent irlandais direct, Murphy’s, qui s’est replié sur ses terres du Munster pour noyer son chagrin. « Guinness is good for you » dit-on souvent sur l’Ile d’Emeraude. Vous ne comptez donc pas résister au plaisir d’une pinte, right ?

IS GUINNESS GOOD FOR YOU?

En cette belle soirée de septembre où le soleil a enfin remplacé le voile gris qui sévissait depuis quelques jours sur la ville, c’est vêtu d’une veste légère et d’un sac imperméable que je m’apprête à rejoindre les pubs du centre-ville. Imperméabilité est le maître mot car le liquide ambré coule à flots et se retrouve très vite à tacher les mains, les vêtements et le plancher des nombreux pubs qui jalonnent la ville.

Mais c’est précisément cette tache qu’une partie de la société irlandaise souhaiterait effacer. Dans un pays où un jeune de moins de 17 ans sur 4 déclare consommer de l’alcool au moins une fois par semaine, un jour dédié à la Guinness n’est pas toujours vu d’un très bon œil. Les appels au boycott se sont multipliés, dénonçant le coût de la célébration sur le fonctionnement des services d’urgence. Le Premier ministre Enda Kenny a même dû intervenir pour déclarer que les problèmes liés à la consommation d’alcool en Irlande ne résultaient pas uniquement de la célébration de l’Arthur’s Day.

Des comptes Twitter Anti-Arthur’s Day – avec pour symbole une pinte renversée - ont été ouverts. Le chanteur de folk Christy Moore et les Waterboys ont repris du service pour signer deux titres critiquant le côté commercial et alcoolisé de la journée festive renommée alcoholiday. De ce côté, la coupe semble définitivement pleine.

De l’autre côté en revanche, l’argent, comme la bière, coule à flots. Avec 3 millions de pintes (56,8 cL) produites chaque jour dans l’usine de Saint James’s Gate, 10 millions de pintes vendues chaque jour dans le monde et une production annuelle de 82,9 millions d’hectolitres, le tonneau est loin d’être percé pour Diageo ! La fête peut continuer de battre son plein grâce à la multitude d’évènements organisés pour l’occasion : plus de 500 concerts organisés dans les 32 comtés le temps d’une soirée, nul doute que le réveil soit difficile le lendemain !

Affalé sur son canapé après avoir visité des pubs, évité les pintes de Guinness renversées, les bagarres et la folie furieuse des taxis et des ambulances qui fendent le brouillard qui commence à s’installer, le petit correspondant de presse ne sortira pas en ville demain soir.

C’est à ce prix-là que vous avez accès à de l’information sur le continent.


Notez


Maxence Salendre
Amoureux des langues et cultures étrangères, je conjugue mes rêves en anglais, sur l’île... En savoir plus sur cet auteur