Inde : nouveau viol d’une photojournaliste

Ramalingam Va, traduit par Maxence Salendre
27 Août 2013



L’Inde choquée suite à un nouveau cas de viol. Une photojournaliste, stagiaire dans un magazine de la presse locale a été violée par 5 hommes le soir du 22 août à Mumbai, la capitale financière du pays, jusque-là considérée comme une ville relativement sans danger pour les femmes.


Crédits photo -- Danish Siddiqui/Reuters
Crédits photo -- Danish Siddiqui/Reuters
La présence d’un stagiaire masculin à ses côtés n’a pas permis d’éviter ce nouveau drame. Les agresseurs ont réussi à immobiliser le second stagiaire avant d’isoler la victime dans un buisson pour la violer chacun à leur tour. Deux des suspects auraient retenus les stagiaires en les accusant d’avoir tenté de traverser une propriété ferroviaire sans autorisation tandis qu’ils appelaient d’autres collègues. L’incident se serait déroulé près d’un ancien moulin désaffecté de la localité de Mahalaxmi à Mumbai, une zone réputée pour être un lieu de rassemblement des groupes antisociaux.

La victime a été emmenée à l’hôpital après avoir recouvré ses esprits vers 20h (heure locale). Sa famille a été informée du drame. Parmi les deux suspects arrêtés, l’un a été appréhendé en relation avec une autre affaire. Il a avoué avoir participé au viol durant l’interrogatoire et a dénoncé un autre agresseur qui a pu être capturé par les forces de police. Les deux assaillants présumés ont été traduits devant la justice afin de réclamer un mandat de garde à vue pour la poursuite de l’enquête. Une demande validée, l’enquête se poursuivra jusqu’au 30 août. La police suspecte les agresseurs d’avoir planifié leur action et les investigations sont dès lors menées dans le but de prouver la préméditation.

Un test pour la nouvelle loi anti-viol

En décembre de l’année dernière, le viol d’une étudiante en physiothérapie, également accompagnée d’un ami, avait déclenché une vague de protestations sans précédent dans le pays. A la suite des manifestations, un comité sous la houlette d’un ancien juge de la Cour Suprême avait été chargé de fournir des recommandations pour une nouvelle loi anti-viol. La plupart des recommandations ont été inclues dans les nouveaux amendements à la loi pénale récemment entérinés par le Parlement. La loi prévoit une période de prison de 20 ans minimum (la perpétuité existe également) pour les accusés. Une amende visant à couvrir les frais hospitaliers et de réhabilitation de la victime est également prévue. L’application de cette loi dépendra toutefois de la rapidité des procédures judiciaires.

Levée de boucliers au Parlement

La Chambre basse du Parlement Indien a été le témoin d’une série de réactions outragées concernant les cas répétés de viols en Inde. Les législateurs, à l’unisson, ont exprimé leurs inquiétudes dès l’ouverture de la session parlementaire et notamment, leur angoisse suite à la répétition de ces crimes malgré la mise en place de mesures répressives strictes. Le ministre des Affaires Parlementaires Kamal Nath a déclaré qu’un rapport serait effectué par le gouvernement provincial concernant ce drame.

Le ministre de l’Intérieur Sushil Kumar Shinde doit également faire une allocution lundi. Les membres de l’opposition ont dénoncé l’insécurité régnante à Maharashtra et le manque de crédits transférés, malgré les 10 milliards de roupies (l’équivalent de 120 millions d’euros) du fonds Nirbhaya promis. Ce fonds avait été proposé il y a quelques mois par le gouvernement suite à une affaire de viol à Delhi. L’argent de ce fonds doit servir à financer les soins et les frais de réhabilitation des victimes de viol dans le pays.

L’Inde, un pays dangereux pour les femmes ?

Un second suspect arrêté | Crédits photo -- AP
Un second suspect arrêté | Crédits photo -- AP
Bien que le panthéon indien fasse la part belle aux déesses, la réalité sociale est bien différente. Une étude menée par Trust Law, une agence de conseil juridique dirigée par la Fondation Thomson Reuters déclare l’Inde comme étant le pire pays parmi les pays du G-20 concernant la sécurité des femmes. L’Inde arrivait 19e au classement, juste devant l’Arabie Saoudite qui, jusqu’à 2011, niait aux femmes des droits fondamentaux tels que le droit de vote et le droit de conduire. L’un des sondeurs de Trust Law déclare qu’il existe des parallèles entre l’Inde et l’Arabie Saoudite : la possession d’un chromosome Y peut faire bien des différences quant à l’avenir de chaque individu. Une manière plus politiquement correcte de dire que l’oppression masculine prévaut dans les deux pays.

Sous-estimation des cas de viols

Bien que les citoyens soient informés des cas de viols, de nombreux experts déclarent que le nombre de cas est sous-estimé. Malgré la hausse du nombre de viols entre 1990 et 2008 (ils ont presque doublé), des rapports suggèrent que toutes les victimes ne déclarent pas avoir été agressées. Parmi les raisons qui peuvent expliquer ce phénomène on compte la peur d’être tenu au ban de la société et la perte de toute intimité. Bien que le nombre de cas rapportés par personne diminue, les statistiques révèlent qu’un cas de viol est rapporté toutes les 20 minutes. Selon le Bureau des Statistiques Criminelles, 24,206 cas ont été recensés en 2011.

Malgré la colère populaire et la mise en place de lois toujours plus répressives, les cas de viols continuent de se répéter. En agressant une stagiaire journaliste, un membre du corps médiatique, les coupables ont signé par leur effronterie leur volonté de commettre ces crimes haineux. Le gouvernement doit maintenant s’efforcer d’agir pour empêcher que d’autres crimes similaires soient perpétrés et améliorer la sécurité dans le pays pour les femmes tout en assurant une justice diligente pour les victimes.

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