Inde : du cash pour desperate housewives

3 Octobre 2012



Le gouvernement indien prépare une loi qui contraindrait les maris à verser une part de leur salaire à leur épouse femme au foyer. Les défenseurs de l'égalité homme-femme ne sont pas les seuls perplexes.


Inde : du cash pour desperate housewives
Depuis quelques semaines en Inde, le débat est vif autour d'un projet de loi annoncé par le Ministère des Femmes et du Développement de l'Enfant. Le texte qui devrait passer devant le Parlement dans les 6 mois prévoit de rémunérer les femmes au foyer à partir du salaire de leur mari. Krishna Tirath, Ministre en charge du dossier, souhaite donner un prix au travail domestique pour assurer l'indépendance économique des épouses indiennes : « Après le mariage, une majorité d'Indiennes s'occupe du foyer mais ne reçoit aucun salaire en échange. Une situation qui devient tragique car quand ces femmes divorcent ou perdent leur mari, elles n'ont plus rien pour survivre. », a-t-il souligné dans une interview accordée au New Indian Express. Mais en terme d'émancipation féminine, les vertus d'un tel projet sont loin d'être évidentes. Certains le voient comme une perte de temps.

Monétiser la vie de couple

Combattre les inégalités entre les sexes en installant le salariat dans la vie de couple semble contradictoire. Dans un éditorial du journal The Hindu, Maya John, militante et chercheuse à l'université de Delhi oppose qu'une telle mesure ne ferait que renforcer la condition sociale des femmes indiennes qui les conduit bien trop souvent aux tâches ménagères quotidiennes. « Cette loi ne procurera pas aux femmes un revenu gagné hors de la structure familiale. L'épouse continuera de dépendre du salaire et de l'emploi de son mari, et lui sera ainsi toujours financièrement redevable. » avertit l'universitaire.

Par ailleurs, le Ministre inclut cette mesure dans sa politique d'émancipation économique de la femme afin de lutter contre la violence domestique. Comment un salaire prélevé de celui du mari peut-il réellement améliorer la condition des 2/3 de femmes indiennes victimes de violences domestiques après le mariage ? En passant plus de temps au centre commercial ? Il est permit d'en douter.

Enfin, d'un point de vue moral, instaurer une relation de salariat au sein du couple apparaît comme hautement régressif dans une société indienne où le mariage d'amour est encore insignifiant dans l'ombre des unions arrangées et du traditionnel système de dot. Même les défenseurs du mariage « à l'indienne » rappellent que « la relation homme-femme est basée sur l'affection et non pas l'argent ».

Psychologues, écrivains, féministes et certaines femmes au foyer elle-mêmes s'accordent pour dénoncer ce projet qui illustre l'échec de la politique familiale en Inde. L'éditorialiste Maya John souligne elle l’hypocrisie du gouvernement qui « se décharge en fait de sa responsabilité de reconnaître la contribution des femmes à l'économie du pays ».

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Thomas Denis
Je suis étudiant en journalisme à Chennai au sud de l'Inde. Diplômé de l'école de journalisme de... En savoir plus sur cet auteur