Le triptyque « Stop austerity, support Greece, change Europe » ornant la place du Parlement, résume l’espoir des Grecs à la veille des nouvelles discussions entre l’Union européenne (UE) et le gouvernement. Subissant la crise de plein fouet, la population ne peut envisager la mise en place de nouvelles mesures d’austérité. Si on compare avec le début de la crise en 2009, le PIB du pays et le taux de chômage ont chuté de 25%. Ce taux atteint 50% chez les jeunes. La paupérisation de la société grecque est telle que l’accès aux soins médicaux devient aujourd’hui un privilège de l’âge.
La crise économique à l’origine de la crise sanitaire
Devant le peu de moyens des personnes âgées, certaines pharmacies font payer les médicaments aux seniors de peur qu’ils ne soient plus assurés. Ils sont, avec les enfants, les premières victimes du manque de ressources dans les hôpitaux. Ceux-ci ont tendance à établir des priorités : notamment, ils ne vaccinent plus les enfants et n'envoient plus d’ambulances lorsque l’âge du patient est très avancé. Espoir ou idéalisme, les manifestants souhaitent rappeler aux Européens que derrière les chiffres de la dette se trouvent des hommes et des femmes, une population qui ne supportera pas une nouvelle chute de son niveau de vie.
« Nous n’avons plus le temps de jouer » annonçait récemment Donald Tusk, président du Conseil européen. Plus que jamais, il s’avère aujourd’hui nécessaire de trouver un accord pour que le gouvernement grec puisse rembourser une partie de ses créances d'ici le 30 juin. Dans le cas contraire, la Grèce se retrouverait dans une situation inédite dans l’Union Européenne : celle d’un défaut de paiement pouvant conduire à la sortie de la Grèce de la zone euro. Cette éventualité grotesque il y a quelques jours, semble de plus en plus probable pour une frange de population grecque.
Vers un Grexit ?
Solution longtemps perçue comme improbable du fait de ses conséquences économiques et symboliques dans l’Union européenne, certains Grecs considèrent aujourd’hui que les leaders européens ne comprennent pas, ou ne veulent pas comprendre, la situation actuelle du pays. Si des réformes au niveau des retraites anticipées sont envisageables, il n’est pas acceptable de toucher aux montants des faibles retraites ou d’augmenter le prix de l’électricité. La mise en place de ces réformes toucherait principalement la classe moyenne et les plus pauvres, contraints de se priver de chauffage en hiver et de devoir payer des factures d’électricité déjà importantes du fait de leur combinaison avec les taxes communales.
Le manque de clarté de ces réformes et des négociations agacent la population qui perçoit dans la multitude des acteurs et le manque de solidarité, une volonté à peine dissimulée par l’UE de voir la Grèce sortir de l’euro. Pour Maria, l’Union européenne aurait pu encourager un plan de relance de l’économie de type keynésien pour aider l’économie grecque. « Les créanciers et l’Union européenne sont lassés des discussions autour de la crise grecque. Ils veulent en finir et faire de la Grèce un exemple pour les autres États en difficulté dans l’Union, les PIIGS ».
« Si nous n’avons pas de compromis honnête, nous dirons une nouvelle fois un grand non » Alexis Tsipras
Pour cette jeune trentenaire, titulaire de masters en droit et en économie, chercher du travail à l’étranger est peut-être une solution pour la jeunesse grecque. Mais ce n’est pas la sienne : « Je compte rester en Grèce et me battre aux côtés de la population grecque pour un avenir meilleur ». C’est pour sa volonté et sa lutte, pour son refus du compromis « injuste » que la population soutient le Premier ministre. Au-delà des enjeux politiques, économiques et sociaux, cet engouement autour de la fermeté d’Alexis Tsipras met en évidence un point essentiel dans les négociations, pourtant peu pris en compte par les Européens : la dignité.
Jonglant avec les créanciers et les membres de sa coalition, Tsipras a, pour ces jeunes, le courage de défendre l’intérêt de la population. Une population divisée qui, si elle ne souhaite pas quitter l’Union européenne et l’euro, semble intégrer l’idée d’un « Grexit ». Désabusée par l’intransigeance des institutions financières et européennes, cette population croit encore en l’UE mais surtout en la Grèce et sa capacité de résilience, et ce quel que soit le sort du pays le 30 juin prochain.