G77 : un G8 sous les cocotiers

22 Juillet 2013



Vivant à l’ombre du G8, le G77 regroupe la majorité des pays du tiers-monde, mais aussi la Chine. Il s’est réuni en mai dernier. L’occasion de faire entendre sa voix, notamment sur le sujet du réchauffement climatique et d’exister en tant que contre-pouvoir. Cette coalition a un seul objectif : promouvoir les intérêts économiques de ses membres invisibles aux yeux de l'Occident.


Crédit photo -- Ministry of information
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Le sommet du G8 est un moment attendu et reconnu dans le monde de l’économie où États-Unis, Japon, Russie, France et Allemagne, notamment, débattent de finances, de sécurité et d'autres sujets de politique internationale. Le plus grand rassemblement de chefs d’État au mètre carré. Le sommet est scruté et mis en avant par tous les médias.

À côté de ce G8, on retrouve un autre regroupement de pays : le G77. Il s’est réuni pour la première fois en 1964 à Genève lors de la conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED). L'objectif principal était de favoriser la coopération « sud-sud » afin de lutter contre la pauvreté à l’international. Les habitants des pays du G77 subissent de rudes conditions de vie. Des conditions en partie dues à l’éloignement, au manque d’interactivité internationale et donc à l’absence d’évolution technologique.

Une différence de puissance entre les membres

À l’intérieur même du groupement, il y a de nombreux écarts entre les nations. Des micros États, comme la Micronésie, et des pays moins connus comme le Brunei côtoient, au sein de l'organisation, des économies grandissantes ou déjà aguerries, comme la Chine, l’Inde ou le Brésil.

Aujourd’hui, cette organisation se dit inquiète par l’évolution des problèmes liés à la pauvreté. Ils se basent sur les objectifs du millénaire pour le développement (OMD) de 2015 qui rassemble 8 objectifs de développement internationaux comme la réduction de la pauvreté, le taux de mortalité infantile, la lutte contre les maladies et la réduction des écarts économiques entre pays. Ce groupement met en évidence la fracture qu’il existe encore entre les pays du Nord et les pays du Sud. Cependant, grâce à des organisations de ce type, les écarts sont considérablement réduits. De véritables moyens sont mis en place pour permettre l’accès aux ressources, aux transports et aux technologies.

Une organisation peu médiatisée qui avance dans l’ombre de son grand frère. Malgré une date de fondation antérieure au G8 (1975), le G77, créé le 15 juin 1964, apparait comme délaissé et sous-médiatisé. Contrairement à ce que son nom laisse présager, le mouvement regroupe 132 pays membres. Ce regroupement comprend en très grande majorité des pays en développement (PED). Cette composition peut expliquer le peu d’impact sur les nations fortes de la planète. Depuis sa création, plus de 40 pays ont eu l’opportunité de diriger ce groupe. Il y a une grande diversité de nations et de cultures dans cette alliance, la rendant véritablement internationale. Des pays d’Afrique subsaharienne, d’Asie centrale, des pays Balkans ou encore des Caraïbes y sont présents.

Cependant, cette notion de pays dit « en voie de développement » reste à nuancer, car on y retrouve des pays comme l’Argentine, le Brésil et surtout la Chine.

La Chine en capitaine de route

Nul besoin de rappeler l’implication actuelle de la Chine à l’internationale. Présente dans à peu près tous les secteurs de l’économie, elle fait figure d’intrus au milieu de la faiblesse économique des pays membres du G77. Sa puissance stratosphérique règne sur l’organisation. Dernière preuve en date, le sommet de mai 2013, où pas moins d’une vingtaine de limousines flamboyantes ont été dépêchées spécialement sur place pour des « besoins » logistiques. Le pays de Mao est alors une véritable publicité qui profite aux pays démunis du rassemblement.

La Chine se bat à côté de ses pays pour faire appliquer le principe de développement international, bien conscient qu’auparavant elle se trouvait dans cette même situation. Cependant, le gouvernement chinois fournit une aide financière dérisoire comparée à sa puissance économique. «Le gouvernement chinois continuera à contribuer à hauteur de 40 000 dollars au bureau du Président et au secrétariat du G77» a déclaré Li Baodong, représentant permanent de la Chine aux Nations Unies. On imagine bien que la présence active de la Chine au sein de ce regroupement n’est pas anodine.

Un sommet à l’accent du Pacifique

Le dernier sommet s’est déroulé début mai 2013 aux îles Fidji sous la gouvernance du Premier ministre Voreqe Bainimarama. C’est la première fois qu’un pays du Pacifique honorait la présidence. À l’ordre du jour, on retrouvait les énergies renouvelables et la candidature d’un nouveau pays, Kiribati.

Le sujet des énergies renouvelables devient aujourd’hui essentiel pour tous ces pays éloignés de tout, et où l’accès y est très difficile. Le coût d’approvisionnement des énergies comme le pétrole, le gaz ou l’électricité y est fortement élevé. Des besoins fondamentaux pour des économies du « bas de l’échelle » qui se doivent de survivre et d’imaginer des jours meilleurs. Pour les pays du Pacifique, l’importation de ses matières peut représenter entre 8% et 12% du Produit National Brut (PNB), autant dire un véritable gouffre financier empêchant les investissements. De ce fait, le sujet des énergies renouvelables devient essentiel pour le futur de ses États. La déclaration de Vince Henderson, président du comité énergétique du G77, reflète bien la situation de ses pays : « Les pays du Pacifique n'émettent que 0.03% des gaz à effet de serre dans le monde. Donc ce n'est pas parce que ce sont de gros pollueurs qu'ils devraient passer aux énergies renouvelables, c'est avant tout pour faire des économies et importer moins d'énergies fossiles, mais aussi pour montrer leur capacité à donner l'exemple et leur capacité de leadership. Ils doivent montrer que le passage aux énergies renouvelables est possible.»

Le petit dernier du groupe ?

Kiribati, divisé en un archipel de 30 îles, est perdu dans l’océan Pacifique entre l’Australie et le Mexique. L’ancienne colonie britannique est aussi grande que la ville de Berlin. Son voisin le plus proche, Hawaï, se situe à 2 000 km. Son Produit Intérieur Brut (PIB) représentait, en 2011, 167 millions, et ne cesse en grimper en flèche ses dernières années (64 millions en 2001). L’État et le secteur maritime se partagent la grande majorité de l’emploi du pays. Un pays qui a bien compris l’importance de se rallier à cette organisation pouvant l’aider dans ses problèmes.

Aujourd’hui, Kiribati risque de disparaître à cause de la montée du niveau de la mer provoquée par le réchauffement climatique. Julien Blanc-Gras, écrivain et journaliste, auteur de Paradis (avant liquidation), explique que le gouvernement songerait à « délocaliser » une partie de sa population sur un autre territoire. Le problème principal reste l’accès à l’eau potable sur ces petits îlots. « Malgré des puits d’eaux douces présents un peu partout, on observe une véritable perte en terme de qualité et de quantité », affirme Julien Blanc-Gras. Le président de la République Kiribati, Anote Tong, amène une visibilité accrue sur son pays grâce notamment à son action intensive concernant le réchauffement climatique.

Lors du dernier sommet aux Iles Fidji, ce dernier a publiquement annoncé son souhait d’intégrer le G77. Une organisation qui souffre de son manque de reconnaissance comparé au nombre de membres qui le composent.

Kiribati | Crédit photo -- DAVID GRAY/REUTERS
Kiribati | Crédit photo -- DAVID GRAY/REUTERS

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