En mai dernier, le club de football des Sport Boys vient d'enregistrer un renfort de poids pour la saison 2014-2015 en la personne du président bolivien Evo Morales. Premier homme politique à devenir footballeur professionnel. Evo Morales rentre dans le cercle très fermé des footballeurs engagés. "Il a une bonne technique balle au pied et un très bon tir. Il n'aura pas à jouer la totalité des quatre-vingt-dix minutes, vingt minutes seront suffisantes", a déclaré au journal local El Deber, Mario Cronenbold, directeur du club de première division bolivienne. Morales pèche néanmoins par un excès de poids, qui le rend quelque peu pataud sur le terrain.
Peu importe, le coup de communication est réussi à quatre mois de la présidentielle bolivienne du 12 octobre prochain. Candidat à un troisième mandat, le président sortant vient de signer un décret augmentant le salaire minimum en Bolivie de 20 %, ce qui fait passer le salaire minimum à 1 440 bolivianos (environ 150 euros) par mois. Une somme qu'il touchera d'ailleurs pour ses prestations footbalistiques.
Morales n'est pourtant pas un précurseur. Bien avant lui, beaucoup d'hommes politiques se sont essayés au football, cependant ils ont fait le chemin inverse. En passant du vestiaire aux bureaux. En pleine Coupe du Monde, le Brésil a aussi ses figures de proue en la personne de Socrates, Romario ou encore Pelé.
Un phénomène mondial
Capitaine de la Seleçao lors du Mondial 1982, Socrates était un footballeur de talent. C'était surtout un homme très engagé. Diplômé en médecine et surnommé "Le docteur", Socrates restera pour beaucoup de Brésiliens comme le créateur de la "Démocratie Corinthiane". En pleine dictature, il a créé, en effet, au sein du club des Corinthians, un socialisme pur et dur : un système dans lequel chaque décision du club était soumise au vote des joueurs. En 2011, l'ancien international brésilien est décédé d'un choc sceptique à l'âge de 57 ans. Les joueurs de Corinthians lui ont rendu un vibrant hommage lors d'un match contre Palmeiras en brandissant tous le poing vers le ciel.
Le roi Pelé a aussi eu son heure de gloire. Après son immense carrière, il a été nommé ministre des Sports dans le gouvernement de Fernando Henrique Cardoso de 1994 à 1998. Pelé a ensuite été ambassadeur de l'ONU, de l'Unesco et de l'Unicef. Dernièrement, c'est l'ancien attaquant de la Seleçao, Romario qui est maintenant député fédéral de Rio de Janeiro depuis 2010. Son combat contre le Mondial 2014 a fait de lui un élu aimé du peuple à l'image de ses exploits en Coupe du Monde sous le maillot auriverde.
Enfin, le phénomène s'est propagé jusqu'en Afrique où dans le petit pays du Liberia, le ballon d'or 1995, Georges Weah s'est reconverti dix ans après son sacre en candidat à la présidence de son pays. Star internationale du ballon rond, et idole dans son pays, « Mister Georges » se présente à l'élection présidentielle de 2005. Élection qu'il perd avec tout de même près de 40% des voix. Ce n'est que partie remise, car le Libérien est convié à introduire le nouveau gouvernement en tant que ministre des Sports. Poste qu'il occupe toujours aujourd'hui.
Aujourd'hui encore, certains footballeurs, encore en activité utilisent leur notoriété pour faire passer des messages à la population. À l'image de Didier Drogba qui au soir de la qualification de la Côte d'Ivoire au Mondial 2006 déclarait à une Côte d'Ivoire alors en pleine guerre civile : « Ivoiriennes, Ivoiriens, on vous a prouvé aujourd'hui que toute la population de la Côte d'Ivoire peut cohabiter, peut jouer ensemble pour un même objectif. Aujourd'hui, on vous le demande à genoux : un pays qui a toutes ces richesses ne peut pas sombrer dans la guerre comme cela. » Certains diront que ces quelques mots ont contribué à restaurer la paix dans le pays. Cependant, on imagine mal la nouvelle génération de joueurs prendre le flambeau de leurs illustres prédécesseurs, un Messi politicien ou un Cristiano Ronaldo ministre, on demande à voir. Contentons-nous déjà de ces sportifs qui sont dans le cercle très fermé des sportifs politiciens.