Rétroprojecteur fonctionnant grâce au solaire, dans une école en zone rurale où l’accès à l’électricité est difficile – Crédit Selco India
Selon le gouvernement indien, 94 % des individus auraient aujourd’hui accès au réseau électrique dans les villes. En revanche, ils ne seraient que 67 % dans ce cas dans les zones rurales. Pas moins de 300 millions d’individus, soit un quart de la population indienne, seraient donc encore privés d’électricité dans ce pays. Face à ce constat, des entreprises indiennes se sont engagées dans la mise en place de systèmes de production d’énergie renouvelable dans les zones champêtres. Ces solutions présentent l’avantage de très bien s’adapter aux réalités locales, tant géographiques qu'économiques. Surtout, elles participent au développement économique et social de l’Inde rurale en favorisant particulièrement l’éducation des enfants. Ces initiatives illustrent bien les possibilités offertes par les énergies renouvelables dans une perspective de développement durable.
Les conséquences d'un accès limité à l'électricité
Les difficultés d’accès à l’électricité dans les campagnes indiennes sont nombreuses. D’abord, le prix du kilowattheure est assez élevé comparé au coût de la vie : 6 centimes d’euros le kWh (selon l'EIA) pour un PIB de 1300 € par habitant en Inde (selon la Banque Mondiale), contre 14 centimes d’euros le kWh pour un PIB de 36 000 € par habitant en France. L’électricité est donc un bien relativement cher en Inde. Lorsque le raccordement électrique existe dans les villages, il est souvent défectueux et cause de fréquentes coupures d’électricité, notamment lors d’intempéries ou de pics de consommation. Il arrive d’ailleurs qu’une simple chute d’arbre lors d’une tempête entraîne la rupture d’un câble électrique reliant un village à la ville. Ce type d’incident nécessite l’intervention d’une équipe technique pouvant mettre plusieurs jours à le réparer.
Lorsque un village n’a pas accès à l’électricité, c’est souvent qu’il est trop excentré. Son éloignement des centres de production implique d’importantes pertes en ligne au niveau du raccordement, et les difficultés d’accès à un village situé dans les hauteurs induisent des coûts d’installation qui sont systématiquement jugés prohibitifs.
Les besoins électriques dans ces villes ne sont souvent que de première nécessité : concernant principalement l’éclairage, ils ne représentent généralement que quelques watts par foyer. Mais les conséquences d’un manque de lumière sont importantes. Dans bien des villages, il fait déjà nuit lorsque les enfants reviennent de l’école. La lampe à pétrole peut leur permettre de faire leurs devoirs, mais encore faut-il qu’ils en aient l’autorisation. Surtout, l’essence nécessaire au fonctionnement de la lampe coûte cher, ce qui les empêche souvent de lire de leur plein gré, pour leur plaisir. Le manque d’électricité est donc un obstacle à l’éducation de ces enfants.
Cette situation freine le développement social de l’Inde. Par exemple, dans ce pays où vingt-trois langues officielles et de nombreux dialectes locaux coexistent, l’apprentissage du hindi et en particulier de l’anglais est un enjeu majeur : seule leur maîtrise permet d’intégrer une bonne université. Dans un milieu rural conservateur et traditionnel comme celui de l’Inde, où les activités agricoles se perpétuent de génération en génération, l’éducation des jeunes est aussi le seul moyen de leur offrir la liberté de choisir leur activité future. Pour les femmes, l’enjeu est peut-être encore plus fort. La pratique de la dot étant encore d’usage en ces terres, l’accès à l’enseignement signifie pour elles l’espoir de choisir leur emploi, d’être payées correctement, et ainsi d’acquérir plus d’indépendance et de liberté. L’amélioration de l’accès à l’électricité dans ces zones, en fournissant des conditions plus favorables à l’éducation, peut donc avoir des conséquences sociales réelles.
Cette situation freine le développement social de l’Inde. Par exemple, dans ce pays où vingt-trois langues officielles et de nombreux dialectes locaux coexistent, l’apprentissage du hindi et en particulier de l’anglais est un enjeu majeur : seule leur maîtrise permet d’intégrer une bonne université. Dans un milieu rural conservateur et traditionnel comme celui de l’Inde, où les activités agricoles se perpétuent de génération en génération, l’éducation des jeunes est aussi le seul moyen de leur offrir la liberté de choisir leur activité future. Pour les femmes, l’enjeu est peut-être encore plus fort. La pratique de la dot étant encore d’usage en ces terres, l’accès à l’enseignement signifie pour elles l’espoir de choisir leur emploi, d’être payées correctement, et ainsi d’acquérir plus d’indépendance et de liberté. L’amélioration de l’accès à l’électricité dans ces zones, en fournissant des conditions plus favorables à l’éducation, peut donc avoir des conséquences sociales réelles.
Les énergies renouvelables, une solution efficace
Les systèmes de production d’énergie renouvelable sont une solution pour répondre aux enjeux de l’accès à l’électricité dans les zones champêtres. Ne nécessitant ni combustible ni raccordement au réseau électrique, ils sont parfaitement autonomes, et présentent de nombreux autres avantages. L’exemple de Senthil et Deepti Kumar, parents de trois enfants et agriculteurs dans les plantations de thé du sud de l’Inde, l’illustre très bien. Ils habitent un petit village nommé Ramachandrapura situé dans les hauteurs, à 70 km de la première ville ayant accès au réseau électrique. Ils dépensaient jusqu’alors 80 roupies par mois, soit 1 euro en essence de lampe à pétrole, et ce pour une utilisation limitée et un éclairage spartiate. Désireux d’améliorer leur confort de vie, ils souhaitaient souscrire à un contrat d’éclairage comprenant trois lampes basse consommation pour une charge électrique équivalente à 3 watts par lampe.
Deux options s’offraient alors à la famille Kumar. La première, le Solar Home System, est un kit solaire autonome qui comprend la lampe, le panneau solaire, et la batterie pour assurer une certaine autonomie et permettre d’avoir de la lumière le soir. Le panneau se fixe sur le toit, et le tour est joué : le foyer est énergétiquement indépendant. La seconde option, le Solar Mini-grid, est un mini-réseau solaire centralisé. L’ensemble des panneaux solaires est installé sur le toit le plus ensoleillé du village puis l’électricité est redistribuée, fournissant ainsi l’éclairage aux différents souscripteurs.
Le second modèle de partage d’électricité est plus flexible au niveau énergétique, mais aussi plus long à mettre en place. Chacun de ces systèmes offre en réalité des avantages et des inconvénients qui dépendent des spécificités de chaque village : situation géographique, conditions sociales ou encore nombre de souscripteurs. Par exemple, si plusieurs foyers du village souhaitent disposer d’un éclairage solaire, et si les liens sociaux entre eux sont bons, il est préférable d’opter pour l’option de partage d’électricité, le Solar Mini-grid. Cette solution est plus efficace dans la gestion de l’énergie : si un foyer a utilisé plus d’électricité que prévu, il peut ponctionner celle de son voisin. Le Solar Home System présente quant à lui l’intérêt de l’autonomie et de la rapidité d’installation : Senthil et Deepti ont d’ailleurs préféré cette option. Dans les deux cas, l’éclairage de source solaire offre l’immense avantage d’une énergie gratuite.
Cela dit, ces systèmes ont aussi leurs limites. Il faut d’abord reconnaître qu’un système de production solaire ne garantie pas un cycle de vie 100 % écologique, même s’il l’est davantage que les systèmes de production d’énergie thermique. La durée de vie des batteries est limitée à six ou sept ans, celles-ci sont difficilement recyclables et, en Inde, le recyclage des panneaux solaires n’est pas encore systématique. Cependant, l’obstacle le plus important au recours à ces systèmes d’énergie renouvelable dans les milieux ruraux concerne l’investissement initial. Pour la famille Kumar, il faut compter un peu moins de vingt euros pour leur système de trois lampes, mais dans un pays où la majeure partie du revenu est dépensé pour l’alimentation, cela représente beaucoup. Heureusement, des solutions existent, et le microcrédit en est une. Les entreprises de microcrédits, nombreuses dans ce pays, proposent par exemple un emprunt sur deux ans à un taux fixe de 17 % : en seulement deux ans, Senthil et Deepti auront donc remboursé leur emprunt, en payant chaque mois la même somme que celle dépensée autrefois pour le pétrole de leur lampe, soit 80 roupies. Ils auront alors accès à l’éclairage gratuitement.
Des entreprises indiennes performantes et responsables
Aujourd’hui, des initiatives variées ont été menées en Inde dans le domaine des énergies renouvelables. D’autres systèmes, comme l’éolien, les petits systèmes hydrauliques appelés « pico-hydro » ou les systèmes de biomasses, sont adaptables pour ces zones décentralisées. Néanmoins, il faut différencier les systèmes de production à petite échelle - installés pour un village, une école ou destinés directement aux particuliers, qui sont de l’ordre du watt ou du kilowatt - des systèmes de production d’énergie renouvelable à grande échelle, qui sont eux de l’ordre du mégawatt et qui sont, comme dans le Nord-Est de l’Inde, raccordés au réseau national. Les premiers sont destinés à rendre autonomes et indépendantes énergétiquement des zones décentralisées. Les seconds visent à produire de l’électricité pour le réseau national tout en diminuant l’impact environnemental. Les deux problématiques sont donc assez différentes. Pour les grands projets, les entreprises chargées de l’installation sont des entreprises indiennes importantes ou internationales. En revanche, celles qui opèrent en zones champêtres sont généralement de plus petite taille.
Souvent, ces entreprises sont très engagées dans l’amélioration des conditions de vie des populations rurales en s’appuyant sur les énergies renouvelables. L’enjeu principal auquel elles doivent faire face réside dans leur capacité à maintenir un rapport de proximité entre installateurs et utilisateurs, afin d’assurer le bon fonctionnement et la maintenance des équipements de production d’énergies renouvelables.
Pour y remédier, l’entreprise Selco India, spécialisée dans les installations solaires, propose une offre de proximité à ses utilisateurs, grâce à sa quarantaine de branches réparties principalement dans l’État du Karnataka et qui constituent des centres de vente, d’installation et de maintenance. L’entreprise attache aussi une importance toute particulière aux relations de confiance entre clients et fournisseurs, comme l’illustrent bien les propos de son fondateur.
« De ma propre expérience, une collaboration avec un fournisseur fonctionne seulement si vous allez au-delà d’une simple relation professionnelle. Nous devons impliquer nos partenaires dans nos activités, les inviter à des réunions stratégiques de réflexion, et cela ne doit pas se réduire à de simples transactions. C’est grâce à cela qu’aujourd’hui des anciens banquiers partenaires, désormais retraités, ou des personnalités comme l’ancien PDG de la compagnie TATA BP nous appellent encore en demandant les progrès et avancées de nos actions. Établir ce genre de relations prend du temps. Selon moi, et c’est seulement mon opinion, le professionnalisme seul ne fonctionne pas, en particulier dans notre secteur » explique Harish Hande, fondateur et dirigeant de Selco India.
Le recours aux énergies renouvelables en Inde constitue aujourd’hui une solution efficace pour offrir aux populations non-urbaines un meilleur accès à l’électricité. Pour la famille Kumar, les avantages de ces écosystèmes de production d’énergie se sont révélés nombreux : des gains économiques bien sûr, mais aussi une plus grande autonomie, un meilleur confort de vie, et la possibilité pour leurs enfants de s’instruire le soir. Le développement durable à travers les énergies renouvelables n’est donc pas un mythe. Des acteurs locaux investis depuis longtemps dans ce domaine, ont déjà prouvé la réelle capacité de ces solutions à améliorer les conditions de vie des peuples indiens installés dans les campagnes.