Copenhague : le succès des salles de shoot

Lauriane Clément, correspondante à Copenhague, Danemark
15 Mars 2013



Les salles de shoot deviennent de plus en plus courantes en Europe. Quatre-vingt de ces centres sont déjà en place dans des pays comme la Suisse, l'Espagne, l'Allemagne ou les Pays-Bas. Le principe de ce dispositif est simple: permettre aux toxicomanes de prendre leurs drogues dures dans un cadre sécurisé.


Photo Virginie Clavières
Photo Virginie Clavières
Au Danemark, Copenhague a ouvert sa première salle de shoot en septembre dernier. Appelée « fixrummet » en danois, cette salle a été installée dans le quartier underground et alternatif de Vestebro dans lequel le problème des drogues dures était manifeste. Avec 300 visiteurs par jour et 10 000 injections de drogue chaque mois, la salle de shoot de Copenhague s’est directement placée comme la plus grande salle d’injection d’Europe du nord. La fixrummet fonctionne selon un dispositif bien précis. Dans cette maison à deux étages, ce ne sont pas moins de 250 volontaires qui se relaient sept jours sur sept. Les toxicomanes apportent eux-mêmes la drogue qu'ils vont s'injecter, se présentent à l'accueil où leur anonymat est respecté (seuls le prénom, la nationalité, l'âge et le type de drogue sont demandés) pour ensuite prendre place dans la salle d’injection qui dispose de cinq places. Deux infirmiers y sont en permanence présents pour vérifier le bon déroulement de l’injection.

Dialoguer contre la drogue

Evidemment, le but des salles d’injection n’est pas d’encourager les toxicomanes à se droguer, ainsi que le pensent certains sceptiques comme Joséphine Baxter, la vice-présidente de la Fédération mondiale contre les drogues. Au contraire, ces centres permettent de combattre de manière intelligente la prise de drogues dures. Au-delà de sa mission purement médicale, le personnel soignant privilégie surtout le dialogue avec les « addicts ». Pour cela, tout un espace de repos et de restauration est organisé dans la fixrummet, afin d’aider les infirmiers à établir un contact avec les toxicomanes. Lorsqu’ils sont prêts, des programmes de substitution comme la méthadone leur sont également proposés. Ces mesures sont essentielles pour réintégrer les toxicomanes dans la société, qui leur permettra de sortir efficacement de leur addiction et de leur marginalité.

Un bilan positif

Si les chiffres indiquant le pourcentage de décrochages grâce aux salles d’injection est difficile à connaître, il est certain qu’elles permettent de sauver bien des vies. Frank Jensen, le maire de Copenhague, a récemment souligné le bilan positif de la salle de shoot de Copenhague. Depuis sa mise en place il y a quatre mois, celle-ci a permis d'éviter l'overdose de six personnes, qui ont été prises en charge suffisamment rapidement par le personnel médical pour éviter une mort certaine. Le dernier rapport de l’ONG International Drug policy consortium (IDPC) indique également que le nombre de morts par overdose a diminué et la transmission de virus comme le sida a ralenti dans les villes disposant de salles de shoot.

Enfin, au niveau du quartier de Vestebro, la colère des habitants, inquiétés par l’ouverture d’un tel centre, semble également être calmée. Selon plusieurs témoignages, les effets seraient plutôt bénéfiques et rendraient le quartier plus sécurisé.

Paris verra naître une salle de shoot expérimentale à l’été prochain, ce qui provoque déjà un tôlé chez plusieurs associations françaises. Aura-t-elle le même succès que celle de Copenhague ? Il n’y a plus qu’à l’espérer.

Notez