On parodie souvent Karl Marx en affirmant qu’après la religion, le football est devenu le nouvel opium du peuple. Boïko Borissov semble bien avoir saisi l’importance du ballon rond et, par un dribble déstabilisateur, tire à nouveau la couverture médiatique à lui tout en jetant un énième rideau de fumée sur ses activités. À 54 ans, il est devenu cette saison le plus vieux footballeur de Bulgarie à fouler les terrains sous le maillot du FC Vitosha Bistritsa, promu de seconde division.
L’histoire est belle, mais doit en grande partie sa médiatisation au profil atypique du bonhomme : il y a seulement quelques mois, il était encore Premier ministre de la Bulgarie. Arrivé au pouvoir après la victoire du parti centre-droit GERB (Citoyens pour le développement européen de la Bulgarie, parti dont il est le fondateur) aux élections législatives de 2009, Boïko Borissov est contraint de démissionner avec son gouvernement en février 2013 après une série de manifestations contre la hausse du prix de l’électricité.
« Je ne veux pas participer à un gouvernement dont la police frappe les gens et où les menaces de manifestations remplacent le débat politique », déclare-t-il alors, désireux de soigner son image pour mieux rebondir lors des élections législatives anticipées de mai 2013. Il est en passe de réussir son pari lorsque son parti arrive en tête de ces élections avec 30,5% des suffrages, soit un total de 97 sièges, 20 de moins qu’en 2009. Cette baisse lui sera fatale quand ses anciens alliés du parti Ataka refuseront de le soutenir, laissant libre la gauche ainsi majoritaire de former un gouvernement.
L’histoire est belle, mais doit en grande partie sa médiatisation au profil atypique du bonhomme : il y a seulement quelques mois, il était encore Premier ministre de la Bulgarie. Arrivé au pouvoir après la victoire du parti centre-droit GERB (Citoyens pour le développement européen de la Bulgarie, parti dont il est le fondateur) aux élections législatives de 2009, Boïko Borissov est contraint de démissionner avec son gouvernement en février 2013 après une série de manifestations contre la hausse du prix de l’électricité.
« Je ne veux pas participer à un gouvernement dont la police frappe les gens et où les menaces de manifestations remplacent le débat politique », déclare-t-il alors, désireux de soigner son image pour mieux rebondir lors des élections législatives anticipées de mai 2013. Il est en passe de réussir son pari lorsque son parti arrive en tête de ces élections avec 30,5% des suffrages, soit un total de 97 sièges, 20 de moins qu’en 2009. Cette baisse lui sera fatale quand ses anciens alliés du parti Ataka refuseront de le soutenir, laissant libre la gauche ainsi majoritaire de former un gouvernement.
Toujours dans l’attente de son premier but
Crédits Photo -- Tsvetelina Angelova
Propulsé à la tête de l’opposition, Boïko Borissov peut accorder plus de temps au Vitosha Bistritsa, modeste club de la banlieue de Sofia où il joue en amateur depuis quelques années au poste d’attaquant. S’il se préoccupe toujours de politique, avec par exemple une récente sortie contre le gouvernement socialiste, auteur d’une résolution interdisant la vente des terres aux non-Bulgares ou encore en suivant les manifestations populaires qui bloquent le pays depuis plus de 160 jours. Jusqu'a présent, il a disputé deux matchs de championnat, sans toutefois marquer. Son club se classe 9e avec 16 points glanés en 13 journées.
Mais ce n’est pas la première fois que l’homme arpente les chemins qui mènent de la politique au sport : il l’avait déjà fait par le passé, mais en sens inverse, en devenant responsable de la sécurité de Todor Jivkov, dernier dictateur communiste du pays, alors qu’il occupait le poste d’entraîneur de l’équipe bulgare de karaté. Ceinture noire et toujours parmi les responsables de la fédération nationale, il pratique cet art martial depuis le début des années 1980 et son intégration au sein de l’école de police de Sofia, où il enseignera par la suite.
Officier sapeur-pompier à sa sortie de l’école, il intègre le ministère de l’Intérieur bulgare, son père y occupant un poste important, et développe son réseau. En 1990, il profite de son expérience et de la chute du communisme pour se lancer dans les affaires et monter une société de sécurité privée. Il compte parmi ses clients Siméon II, dernier roi de Bulgarie exilé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et qui se lancera en politique lors de son retour en 1996.
Une fois ce dernier nommé Premier ministre après sa victoire aux législatives de 2001, Boïko Borissov est propulsé à la tête de la police bulgare. Mais après tant d’années à surveiller le bain impitoyable de la politique, le premier flic du pays décide d’y plonger : il se présente coup sur coup aux élections législatives et municipales de 2005 et est élu député (poste qu’il n’occupera jamais) puis maire de Sofia.
L’année suivante, il fonde le GERB qui le mènera jusqu’à la tête du pays.
Mais ce n’est pas la première fois que l’homme arpente les chemins qui mènent de la politique au sport : il l’avait déjà fait par le passé, mais en sens inverse, en devenant responsable de la sécurité de Todor Jivkov, dernier dictateur communiste du pays, alors qu’il occupait le poste d’entraîneur de l’équipe bulgare de karaté. Ceinture noire et toujours parmi les responsables de la fédération nationale, il pratique cet art martial depuis le début des années 1980 et son intégration au sein de l’école de police de Sofia, où il enseignera par la suite.
Officier sapeur-pompier à sa sortie de l’école, il intègre le ministère de l’Intérieur bulgare, son père y occupant un poste important, et développe son réseau. En 1990, il profite de son expérience et de la chute du communisme pour se lancer dans les affaires et monter une société de sécurité privée. Il compte parmi ses clients Siméon II, dernier roi de Bulgarie exilé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et qui se lancera en politique lors de son retour en 1996.
Une fois ce dernier nommé Premier ministre après sa victoire aux législatives de 2001, Boïko Borissov est propulsé à la tête de la police bulgare. Mais après tant d’années à surveiller le bain impitoyable de la politique, le premier flic du pays décide d’y plonger : il se présente coup sur coup aux élections législatives et municipales de 2005 et est élu député (poste qu’il n’occupera jamais) puis maire de Sofia.
L’année suivante, il fonde le GERB qui le mènera jusqu’à la tête du pays.
Le « Berlusconi bulgare »
Une hyperactivité et des connexions entre sport, business et politique dignes d’un Bernard Tapie ou d’un Silvio Berlusconi. « C’est une sorte de Berlusconi bulgare, qui fait des blagues de mauvais goût, mais c’est aussi un homme qui réalise des projets », témoigne le professeur Hristo Hristev, interrogé par Libération au moment des élections législatives anticipées. Car l’homme navigue entre ombre et lumière : outre certaines sorties médiatiques à la limite du racisme, il doit sa réputation sulfureuse aux suspicions émises quant à sa participation à certaines activités illégales.
Si l’enquête ouverte par le Parlement pour déterminer si Boïko Borissov, alors Premier ministre, a bien utilisé au profit du FC Vitosha Bistritsa l’avion gouvernemental peut prêter à sourire, d’autres actions judiciaires viennent entacher sa réputation. Alors qu’il avait fait de la lutte contre la corruption publique l’un de ses principaux chevaux de bataille, nombreux sont ceux à avoir pointé du doigt des connexions avec la mafia issues des années passées au ministère de l’Intérieur ou à la tête de sa société de sécurité privée.
Dans un document diplomatique américain, révélé en 2011 par Wikileaks, sa compagne, Tsvetelina Borislavova, est suspectée d’avoir profitée de sa position au sein d’une grande banque bulgare pour blanchir l’argent issu d’activités illégales, tandis que Boïko Borissov usait de son influence pour la protéger.
Toujours en 2011, le journal bulgare Galeria révélait des enregistrements audio dans lesquels le Premier ministre, en conversation avec Vanyo Tanov, chef de l’agence nationale des douanes, s’assurait de l’arrêt de l’enquête concernant les activités illégales de la brasserie Ledenika. Ironiquement, ces écoutes avaient été ordonnées par Tzvetan Tzvetanov, ministre de l’Intérieur et véritable éminence grise de Boïko Borissov dont il avait été l’adjoint à la mairie de Sofia et le remplaçant à la tête du GERB. Tzvetan Tzvetanov fait d’ailleurs l’objet d’une enquête pour la mise sous surveillance électronique de membres du gouvernement et du parlement.
Sport, business et politique : Boïko Borissov se donne les moyens de réussir dans les différents projets qu’il entreprend. L’avenir nous dira s’il en est de même dans sa septième vie de footballeur… Il a d’ailleurs déjà inscrit une première ligne à son palmarès en étant élu « footballeur bulgare de l’année 2011 », avec 40% des suffrages. Il devança ainsi l’attaquant Dimitar Berbatov, second avec 24% de votes positifs, qui était alors co-meilleur buteur du championnat anglais avec Manchester United (1). Hristo Stoitchkov est prévenu.
(1) Il demandera avec lucidité l’annulation du vote, arguant qu’il s’agissait d’un vote de contestation censé mettre en lumière le faible niveau du football bulgare actuel, alors que l’équipe comptait parmi les meilleures formations européennes au début des années 90.
Si l’enquête ouverte par le Parlement pour déterminer si Boïko Borissov, alors Premier ministre, a bien utilisé au profit du FC Vitosha Bistritsa l’avion gouvernemental peut prêter à sourire, d’autres actions judiciaires viennent entacher sa réputation. Alors qu’il avait fait de la lutte contre la corruption publique l’un de ses principaux chevaux de bataille, nombreux sont ceux à avoir pointé du doigt des connexions avec la mafia issues des années passées au ministère de l’Intérieur ou à la tête de sa société de sécurité privée.
Dans un document diplomatique américain, révélé en 2011 par Wikileaks, sa compagne, Tsvetelina Borislavova, est suspectée d’avoir profitée de sa position au sein d’une grande banque bulgare pour blanchir l’argent issu d’activités illégales, tandis que Boïko Borissov usait de son influence pour la protéger.
Toujours en 2011, le journal bulgare Galeria révélait des enregistrements audio dans lesquels le Premier ministre, en conversation avec Vanyo Tanov, chef de l’agence nationale des douanes, s’assurait de l’arrêt de l’enquête concernant les activités illégales de la brasserie Ledenika. Ironiquement, ces écoutes avaient été ordonnées par Tzvetan Tzvetanov, ministre de l’Intérieur et véritable éminence grise de Boïko Borissov dont il avait été l’adjoint à la mairie de Sofia et le remplaçant à la tête du GERB. Tzvetan Tzvetanov fait d’ailleurs l’objet d’une enquête pour la mise sous surveillance électronique de membres du gouvernement et du parlement.
Sport, business et politique : Boïko Borissov se donne les moyens de réussir dans les différents projets qu’il entreprend. L’avenir nous dira s’il en est de même dans sa septième vie de footballeur… Il a d’ailleurs déjà inscrit une première ligne à son palmarès en étant élu « footballeur bulgare de l’année 2011 », avec 40% des suffrages. Il devança ainsi l’attaquant Dimitar Berbatov, second avec 24% de votes positifs, qui était alors co-meilleur buteur du championnat anglais avec Manchester United (1). Hristo Stoitchkov est prévenu.
(1) Il demandera avec lucidité l’annulation du vote, arguant qu’il s’agissait d’un vote de contestation censé mettre en lumière le faible niveau du football bulgare actuel, alors que l’équipe comptait parmi les meilleures formations européennes au début des années 90.