Berlin, enrichie mais toujours sexy ?

12 Octobre 2012



« Berlin, arm aber sexy » (« Berlin, pauvre mais sexy »). Le slogan, inventé par le maire de la ville, semble aujourd’hui dépassé.


Berlin, enrichie mais toujours sexy ?
L’urbanisme de Berlin se civilise, tout comme les habitants d’une ville en perpétuelle mutation, qui semble aujourd’hui tourner la page de son passé industriel. Cela se manifeste par la fermeture de squats artistiques, comme le Tacheles (voir l’article « La fin de l’art alternatif berlinois »). Certains parlent déjà de « gentrification ». Ce mot a été inventé par Ruth Glass en 1964. Il désigne la réhabilitation physique de vieux quartiers populaires situés en centre-ville et le remplacement de leur population par des catégories sociales plus aisées. Un exemple fréquent est celui du quartier de Harlem à New York.

Tous les cinq ans environ, un nouveau quartier devient à la mode. Après Kreuzberg et Friedrichshain, il semblerait que Neukölln puisse être le nouveau lieu branché, avec ses bars et clubs alternatifs. Les loyers augmentent en conséquence, et tendent à chasser les classes populaires de leurs appartements, notamment les populations d’origine turque. Les jeunes artistes devenus jeunes actifs multiplient les plaintes pour tapage nocturne dans des quartiers comme Prenzlauer Berg, ancien quartier alternatif de Berlin-Est qualifié aujourd’hui de véritable quartier bobo.

Les « vrais Berlinois », si tant est qu’ils existent, cherchent un coupable. Les touristes, étudiants allemands et étudiants Erasmus sont les premiers blâmés. Reprocher aux nouveaux arrivants les changements d’une ville en perpétuelle mutation peut relever d’un discours aux relents racistes. Le propriétaire d’un bar accuse ainsi les gens de « Munich, Barcelone, France, Copenhague, Nüremberg », qui se déplacent selon lui en meute, de vouloir standardiser le quartier de Neukölln, dans une vidéo rageuse publiée sur Vimeo en 2011. (http://vimeo.com/16116523 )

L’enrichissement de Berlin est-il nécessairement un mal ? La ville compte aujourd’hui encore de nombreux créatifs. L’apparition de nouvelles poussettes dans ses rues témoigne également d’une natalité en pleine forme qui contraste avec la croissance démographique du reste du pays. Le défi est de ne pas vendre son âme au capitalisme, et de conserver son charme alternatif et sexy.

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Laurène Perrussel-Morin
Ex-correspondante du Journal International à Berlin puis à Istanbul. Etudiante à Sciences Po Lyon... En savoir plus sur cet auteur