Arles : le noir et blanc à l'honneur!

Emmanuel Girard
6 Juillet 2013



Du 1er juillet au 22 septembre, Arles va vivre des « Rencontres » aux gouts et aux sensations différentes : surprises, découvertes, hommages, temps forts, chocs visuels... Focus sur les nombreuses promesses de la 44e Rencontre internationale de la photographie.


Photos de Gilbert Garcin, extraites du Livre Mister G chez Filigranes Editions - Courtesy galerie Les filles du calvaire, Paris
Photos de Gilbert Garcin, extraites du Livre Mister G chez Filigranes Editions - Courtesy galerie Les filles du calvaire, Paris
Le monde et la télé sont en couleurs, mais pourtant, en cette année 2013, les Rencontres d'Arles préfèrent broyer du noir. Après une année 2012 plutôt décevante, faite de critiques et pointée du doigt à cause du recul de la fréquentation, François Hebel, le directeur de la manifestation, se devait de tenir ses promesses. Et quoi de mieux que la célébration du noir et blanc dans la « capitale mondiale » de la photo. À travers 50 expositions dans cette ville historique, le visiteur va pouvoir voyager au gré des compositions contemporaines, mais aussi passées.

Mais pourquoi le noir et blanc et surtout que signifie-t-il à l'heure actuelle ? D'après l'ancien directeur de l'agence Magnum, le constat est clair : « le noir et blanc n'est plus le même. Il a rencontré l'installation, le numérique, une liberté qui n'existait pas avant ».

Ainsi, pour incarner ce renouveau, ce retour en force incroyable du noir et blanc surfant sur la fameuse vague nostalgique que le monde de l'art connait ces derniers temps, nous pourrons admirer les photos de Jacques-Henri Lartigue, de la planète Mars, mais aussi de trois artistes inévitables : le Chilien Sergio Larrain, Gilbert Garcin qui débuta à l'âge de 65 ans, et enfin le Japonais Hiroshi Sugimoto, maître du noir et blanc.

Larrain, étoile filante de la photo

« Une bonne image naît d’un état de grâce, qui se manifeste quand on est libéré des conventions, qu’on est comme l’enfant qui découvre la réalité. », voilà ce que disait Sergio Larrain, décédé l'année dernière à l'âge de 81 ans, photographe mythique des enfants des rues de Santiago et de Valparaiso. Grâce à ces « Rencontres », le visiteur va enfin pouvoir découvrir l'oeuvre d'un artiste à la carrière aussi rayonnante que fulgurante, lui, le fils de la grande bourgeoisie chilienne né en 1931 qui décidera à l'âge de 40 ans de se retirer dans un coin perdu du Chili pour méditer et réfléchir sur « la foutaise de tout ça » comme il avait l'habitude de dire.

La foutaise de tout ça ? Notre monde qui ne serait que vanité ! Ses photos sont simples et traduisent avec empathie et dénuement les dérives d'un monde qui oublie les plus démunis. Ses principes photographiques ? La géométrie, le nombre d'or, la fluidité, mais surtout l'abstraction.

Avec Garcin, mieux vaut tard que jamais !

Dans la famille des incroyables destins, je voudrais Gilbert Garcin, ancien patron d'une société d'édition et de diffusion de luminaires qui par un concours de circonstances et par peur de « s'emmerder » deviendra un photographe célèbre à 65 ans. Sourire de ce bonheur inopiné, Garcin sait le faire et espère pouvoir en profiter encore un moment dans la pénombre de ses 84 ans.

Mais on ne s'inquiète pas trop pour lui, participer à un concours de photographie et ensuite gagner un stage à Arles dirigé par le photographe Pascal Dolémieux, ça ne pouvait que lui arriver. Mais de la, dès le 1er jour à inventer un nouveau style à partir de collages et de découpages, il en fallait du talent. Il possède ainsi un style assez singulier : ses montages mettent en scène différentes situations qui ont en commun la dérision, l'absurdité de la condition humaine et un humour qui s'apparente parfois à celui du théâtre de l'absurde de Ionesco. En voilà une belle surprise !

Sugimoto ou le maître du noir et blanc

Damien Hirst, Jean-Michel Basquiat, Jeff Koons, Anish Kapoor... Ces noms d'artistes vous disent surement quelque chose ? Et c'est le cas, car ils font partie des 10 artistes contemporains les plus côtés au monde. Mais ce que vous ne savez peut être pas, c'est que le photographe Hiroshi Sugimoto en fait lui aussi partie, situation presque impossible il y a 30 ans avant que la photo ne passe du statut de loisir à celui d'art.

Le Japonais présente ainsi cette année « Révolution », une série de photographies panoramiques en noir et blanc sur l'océan de nuit. Connue pour ses horizons marins, son œuvre se compose de séries ayant chacune un thème différent, mais partageant une logique semblable. Enfin, il est aussi réputé pour son excellente technique photographique, centrée sur l'utilisation du format 8×10 pouces et des expositions extrêmement longues.

Alors, réalité ou abstraction ?

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