Allemagne : l'échange de vêtement, nouvelle mode

Hugo Flotat Talon, correspondant à Chemnitz
24 Janvier 2014



Prise de conscience écologique, manque d’argent ou action de résistance face à la société de consommation, les rendez-vous « Kleidertausch » sont un mélange de ces trois phénomènes. Á l’heure du «Kaffe Kuchen» (Café-gâteaux), ils se multiplient dans les universités allemandes.


© Hugo Flotat Talon/Le Journal International
© Hugo Flotat Talon/Le Journal International
« On espère que ça va bien se passer avec ces demoiselles, qu’il n’y aura pas de bagarre », se marre Elisa Diez. Il y a à peine une heure qu’a débuté le rendez-vous « échange de vêtements », organisé par la jeune fille et deux de ses amies, et déjà la salle fait le plein. « On invite les jeunes à apporter des habits qu’ils ne mettent plus, on rassemble tout au centre du foyer, et chacun peut ensuite repartir avec autant de pièces qu’il a amené. »

Nous sommes à Chemnitz, dans la Saxe, au club culturel de l'université. Ici, c'est le deuxième rendez-vous du genre. « Nous avions organisé ça une première fois, il y a environ un an, et on recommence cette année parce qu'il y avait de la demande », explique la jeune organisatrice. L'université de Chemnitz, fréquentée par près de 10 000 étudiants, ne vient pas d'inventer une nouvelle mode, les échanges de vêtements se pratiquent dans beaucoup de facultés germaniques. S’il est difficile de quantifier le phénomène, en quelques clics sur les réseaux sociaux, on trouve facilement un rendez-vous par semaine sur un des campus du pays.

L'économie collaborative

Les chercheurs universitaires s’intéressent même à cette tendance grandissante, qui consiste à échanger des marchandises de tous types. « L’économie collaborative » est à la mode. Elle dépasse même largement le cadre des facs. Des sites internet recensent ces rencontres échange de vêtements dans tous le pays. Klamottentausch.net est par exemple né en avril 2009. « J’ai crée le site pour accompagner la croissance de ces rendez-vous sur le net », explique Sebastian Backaus à Berlin. Le concept trouve même des débouchés commerciaux. En fin d’année dernière Der Spiegel racontait l’histoire de deux entrepreneuses berlinoises, à la tête d’un magasin de location de vêtements « pour tous les jours ». « On a de plus en plus de clients », confiaient les jeunes femmes au quotidien.

Les récentes révoltes qui ont fait des morts dans les rangs des ouvriers du textile au Cambodge ou au Bangladesh auraient-elles fait changer radicalement le comportement des consommateurs Européens ? En France, l’opération Spam tes Soldes, lancée sur internet, rassemble déjà près de 3000 personnes sur Facebook. Et la chaîne H&M, qui délocalisait il y a peu une partie de sa production en Éthiopie pour fuir les salaires chinois à 300€ par mois, accusait, lors de la première semaine des soldes, une baisse des ventes de 5 à 10 % par rapport à l’an passé. « Je pense que pour les participants à ces rencontres échange de vêtements, il y a à la fois des raisons financières et écologiques », juge Sebastian Backaus. La volonté de consommer différemment ne semble pas l’argument premier, mais est aussi mis en avant par certains étudiants. « Ici, à Chemnitz, on a aussi crée cela parce que nous sommes un club culturel et que tous les prétextes sont bons pour que les gens se rencontrent », explique Elisa Diez.

Dans cette université, on échange donc robes, sacs, ceintures ou jeans mais on partage aussi boissons et gâteaux. Assises sur des fauteuils autour d'une table basse, trois étudiantes en psychologie bavardent. Monica, en échange universitaire, interrompt sa conversation sur les préjugés face aux étrangers pour parler de l’évènement du jour : « C'est la première fois que je vois ce genre de rendez-vous, ça n’existe pas chez moi au Pérou. » Á coté d’elle, une autre étudiante boit un café, son bébé sur les genoux. « C’est calme, on peut discuter, et puis c’est une bonne manière d'économiser un peu d'argent », confie Anne Koscanik.

© Hugo Flotat Talon/Le Journal International
© Hugo Flotat Talon/Le Journal International
Friede Kemmerling, un des rares jeune homme participant qu’on apercevra cet après-midi, s’assoit à son tour sur un canapé à l’écart des tables où sont entassés les vêtements, une boisson dans les mains. « C’est la première fois que je fréquente ce genre d’endroit, c’est vraiment une ambiance différente de celle qu’on trouve dans les magasins traditionnels. » La « cabine d’essayage » placée au fond de la salle illustre bien ses propos. C’est en réalité de simples draps, tendus entre deux caisses de bières contre un des murs de la salle, où les filles sont toutes ensemble pour essayer leurs trouvailles. Clara, jeune lycéenne venue avec deux amies après les cours, s’en approche les bras chargés. « J’ai trouvé des habits en très bon état, les gens n’apportent pas n’importe quoi. Et puis ce serait drôle si je pouvais croiser quelqu'un dans la rue avec les fringues que je portais la semaine dernière », sourit la jeune fille.

En début de soirée, vers 19h, l’opération touche à sa fin. Beaucoup d’habits demeurent sur les tables. Sur la soixante-dizaine de participants, beaucoup sont en effet repartis avec moins qu’ils avaient amené. « Tout ce qui est encore là sera offert à un magasin de vêtements solidaire de la ville », expliquent les organisatrices. Un beau geste, qui devrait se renouveler. Les trois jeunes filles ont déjà reçu des demandes pour une nouvelle après-midi échange.

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1.Posté par Pete Err le 28/01/2014 15:34
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Merci beaucoup. :)

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