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Les relations diplomatiques entre les États-Unis et la Corée du Sud se sont renforcées à la suite de la guerre de Corée. Les deux pays ont signé une première alliance militaire en 1953. Cet accord statuait la présence de près de 29 000 soldats des forces armées américaines en Corée du Sud de façon permanente. Il existe par ailleurs depuis quelques décennies une division militaire conjointe entre les États-Unis et la Corée du Sud pour mener à bien des opérations militaires dans la péninsule coréenne. Ce Commandement des forces combinées fut mis en place à la suite de la guerre de Corée, en 1978. Les soldats sont autorisés à tenir régulièrement des exercices militaires bilatéraux dans le but de prévenir une éventuelle invasion nord-coréenne. Le commandement même de ces opérations est l’apanage des États-Unis. Depuis plus de cinquante ans, les opérations militaires organisées le long de la zone démilitarisée entre les deux Corées se sont faites sous le commandement direct des États-Unis.
L’alliance militaire sud-coréenne et américaine stipule qu’en cas de guerre, les États-Unis exercent le commandement militaire de la Corée du Sud. Plus spécifiquement, ces opérations annuelles sont composées de deux exercices : l’exercice « Key Resolve », un ensemble de simulations informatiques qui durent une semaine, et l'opération annuelle « Foal Eagle » qui mobilise les armées de Terre, de l’Air ainsi que la Marine pendant huit semaines consécutives.
Ces exercices militaires conjoints, menés annuellement, ont un but uniquement défensif, mais la Corée du Nord les considère comme provocateurs. En 2007, un accord fut signé entre les États-Unis et la Corée du Sud prévoyant la dissolution du Commandement des forces combinées en avril 2012 – échéance par la suite repoussée à 2015. Or, 2015 est arrivée, et les deux pays ont encore l’intention de poursuivre leurs exercices. Le 16 janvier, les États-Unis et la Corée du Sud ont par ailleurs officiellement inauguré leur nouvelle division militaire conjointe en charge des opérations en temps de guerre.
La création de cette nouvelle division répond aux différentes menaces nord-coréennes qui se sont multipliées en 2014 : on pense notamment aux cyber-attaques dont ont été victimes les studios Sony Pictures Entertainment. Selon l’accord signé entre Washington et Séoul, en temps de guerre, l’état-major conjoint contrôlera là une division d’infanterie ainsi qu’une brigade mécanisée sud-coréenne. Le Commandement des forces combinées ne semble donc pas être en voie de dissolution, et les relations militaires entre les États-Unis et la Corée du Sud se renforcent autour de la péninsule coréenne.
Des efforts de pourparlers de la part de Pyongyang
Ces dernières semaines, la RPDC (République populaire démocratique de Corée) a fait de nombreux efforts de négociation à l’égard de la Corée du Sud et des États-Unis, en grande partie pour sortir de son isolement économique et diplomatique qui pèse lourd sur les finances du pays. En effet, depuis le début de janvier, Washington a choisi d’alourdir les sanctions financières à l’égard de la Corée du Nord, suite aux cyber-attaques contre Sony Pictures Entertainment Inc. Pour l’instant, les sanctions financières mises en œuvre contre la Corée du Nord ont eu un impact limité, mais les nouvelles sanctions pourraient engendrer des réactions d’ouverture de la part de Pyongyang. A noter que de telles sanctions financières avaient auparavant été efficaces contre d’autres pays tels que la Russie et l’Iran. La Corée du Nord a ainsi offert, le 9 janvier, de suspendre temporairement ses essais nucléaires si les États-Unis arrêtaient leurs exercices militaires avec la Corée du Sud, proposition rapidement refusée par Washington.
Les manœuvres militaires conjointes prévues en février seront cependant reportées plus tard dans l’année, en réponse à l’opposition de Pyongyang. Le ministre sud-coréen de l’Unification, Ryoo Kuhl-Jae, a toutefois annoncé être disposé à rencontrer des représentants de la RPDC afin de discuter de la réunion des familles séparées par la guerre ainsi que des événements organisés en l’honneur du 70ème anniversaire de la division de la péninsule coréenne. Il convient de rappeler que la dernière rencontre officielle entre les deux pays remonte au mois de février 2014. Cette rencontre avait pour but d’établir des négociations concernant la réunion de ces familles séparées par la division des deux Corées. Ces négociations ont été rompues assez rapidement par un regain de tension militaire dans la péninsule.
La dénucléarisation de la péninsule coréenne, un enjeu de taille
La Corée du Nord s’est dotée d’un programme nucléaire en 2003. Depuis, elle multiplie les essais nucléaires dans un objectif d’intimidation des pays limitrophes. Dans le cadre de la dénucléarisation de la péninsule coréenne, la Corée du Sud, la Chine et les États-Unis sont actuellement en train d’élargir leur coopération. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères a pour objectif d’empêcher le programme nucléaire de la Corée du Nord de peser sur les relations inter-coréennes. L’amélioration de ces relations favoriserait alors le programme de dénucléarisation de la péninsule. A cet effet, la Corée du Sud a proposé de tenir des discussions entre les deux Corées, dès le début 2015, afin d’aborder tous les problèmes concernant la péninsule et d'éviter par la même occasion un quatrième essai nucléaire de la RPDC. La Corée du Sud a par ailleurs suggéré de relancer les pourparlers à six, initiés en août 2003 – la Russie, les États-Unis, la Chine, le Japon ainsi que les deux Corées – qui sont au point mort depuis maintenant sept ans.
Le 28 janvier 2015, les émissaires nucléaires américains, sud-coréens et japonais se sont rencontrés au Japon dans l’optique de reprendre des pourparlers avec la RPDC. Sung Kim, représentant spécial des États-Unis sur le dossier de la Corée du Nord, a déclaré lors d’une conférence de presse que la RPDC « doit démontrer son engagement envers la dénucléarisation d’une manière concrète avant que nous puissions reprendre des négociations sérieuses ».
Des informations militaires au cœur des relations internationales
La Corée du Sud, le Japon et les Etats-Unis ont décidé conjointement de constituer un réseau de renseignements militaires entre les pays afin de surveiller les potentiels essais nucléaires nord-coréens. Ainsi, un accord trilatéral est entré en vigueur entre ces trois pays à la fin du mois de décembre 2014. Cet accord garantit le partage des renseignements militaires, notamment concernant les menaces nucléaires ou balistiques posées par la Corée du Nord.
Selon l’accord signé en 1987 entre Séoul et Washington, puis celui entre Tokyo et Washington, le Japon et la Corée du Sud n’échangeront aucune information, le partage des renseignements se fait uniquement par le biais des États-Unis, et avec le consentement des deux pays. Ces renseignements concernent aussi bien les menaces visuelles et orales qu’écrites provenant de Pyongyang.
Les relations sud-coréennes et états-uniennes ne sont pas exemptes de tensions
Les relations militaires entre les Etats-Unis et la Corée du Sud ne sont pas exemptes de tensions et de bavures militaires. De par le Status of Forces Agreement, les soldats états-uniens bénéficient d’un privilège d’extraterritorialité, statut qui couvre également les soldats sud-coréens. En d’autres termes, les affaires judiciaires impliquant des soldats états-uniens stationnés en Corée du Sud ne sont pas jugées par des tribunaux sud-coréens, mais états-uniens, et vice-versa concernant les soldats sud-coréens. Or, cet accord est critiqué par une grande partie de la population sud-coréenne, qui dénonce les actes délictueux de nombreux soldats états-uniens restés impunis.
La récente déclassification de documents militaires états-uniens a remis à l’ordre du jour les exactions commises par les G.I pendant la guerre de Corée, qui sont depuis cinquante ans une source de tensions entre les deux pays. Le rayonnement de plus en plus important de la puissance économique chinoise dans la péninsule coréenne vient poser des risques supplémentaires pour les relations entre les États-Unis et la Corée du Sud, l’influence américaine pouvant s’amenuiser si les relations diplomatiques et juridiques ne sont pas repensées et renforcées.