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C'est en 2013 que ce concept a vu le jour. Onno Selbach, étudiant dénonçant les conditions de logement universitaire, a adressé une demande auprès de Gea Sijpkes, directrice de la maison de retraite néerlandaise, qui a accepté. Ensemble, ils ont établi ce programme d'échange. Les résidences pour personnes âgées aux Pays-Bas étant sous-peuplées à cause de la sévérité de leurs conditions d'inscription, les étudiants y trouvent leur compte, ce qui vaut déjà au projet un large succès.
L'objectif défendu par Humanitas est le renforcement de la cohésion sociale et la lutte contre l'isolement des seniors.
L'idée est simple : en échange de l'accès gratuit à une chambre, les six jeunes sélectionnés doivent consacrer au moins 30 heures par mois à leurs 160 voisins aînés. Les activités sont variées et facultatives. Elles vont de la simple – mais précieuse – compagnie pour les actes quotidiens au graffiti, en passant par le sport ou l'initiation aux nouvelles technologies. Ainsi, face à des logements universitaires coûteux et en mauvais état, cet échange se présente comme une solution aussi bien au manque de moyens des étudiants qu'à la solitude des personnes âgées.
Lutter contre l'exclusion sociale
Il n'existe pas de restrictions spécifiques pour ces jeunes habitants d'Humanitas. Ils sont autorisés à recevoir des amis, petits-amis ou à avoir des animaux de compagnie, tant qu'ils ne nuisent pas à la tranquillité des autres résidents. Jurren Mentik, étudiant en urbanisme et bénévole, confirme : « les plus âgés aiment bien que l'on ait nos propres loisirs. Ils trouvent cela intéressant et intrigant de voir les jeunes s'amuser ». En somme, avec un peu de bon sens et de respect, la cohabitation intergénérationnelle est tout à fait possible, voire très agréable.
Si les « maisons de repos » ou autres « centres de service » sont de manière générale redoutés par les personnes âgées, en France comme ailleurs, ce n'est pas toujours sans raison. Beaucoup craignent d'être déracinées ou abandonnées et il s'agit là d'un sentiment qui tend à se vérifier une fois au sein de tels établissements. Le modèle traditionnel de ces maisons a tendance à rendre les résidents passifs au lieu de les inclure dans des activités. En l'absence de stimulation et d'interaction, aussi bien entre habitants qu'avec le monde extérieur, leur réclusion ne se voit qu'accentuée. L'auteure Annie Boroy explique ce phénomène : « dans leur vie privée, les plus âgés sont souvent seuls, parfois oubliés ou négligés par leurs proches. Ils représentent un poids, ils dérangent et n'intéressent plus les autres. »
Selon une étude réalisée en 2012 par l'Académie Nationale de Science des États-Unis, la solitude et l'isolement social auraient un impact négatif sur la durée de vie. C'est justement pour lutter contre l'exclusion sociale de ces aînés que les jeunes bénévoles d'Humanitas tentent de maintenir un contact, à la fois humain entre les résidents, mais aussi avec le monde extérieur en constante évolution.
Une réelle alternative ?
Malgré la beauté de l'initiative, on note néanmoins deux bémols. D'une part, on peut se demander si le projet mis en place par Humanitas est réellement efficace avec un effectif de 6 bénévoles pour un total de 160 résidents. D'autre part, si les mesures d'austérité ont fortement contribué au dépeuplement des maisons de retraite néerlandaises, ce n'est pas le cas dans toute l'Europe.
Ces pays, pour la plupart, n'ont pas suffisamment de structures pour répondre au vieillissement de la population. Ainsi, un programme accueillant des bénévoles en maison de repos ne serait pas envisageable. C'est donc en dehors des établissements d'accueil que les initiatives intergénérationelles commencent à se développer. En Belgique, il existe par exemple les logements kangourous : des personnes âgées accueillent des étudiants sous leur toit à prix réduit, en échange d'une aide et d'une présence au quotidien.