Liban: Fadel Chaker, le crooner néo-salafiste

20 Décembre 2013


Fadel Chaker, un ex-crooner libanais, devenu islamiste et recherché par les autorités, a mis en ligne cette semaine sur ses comptes Twitter et YouTube une chanson à la gloire de Jésus-Christ. Retour sur l'histoire d'une star de la chanson arabe devenu un meurtrier « jihadiste ».


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Chanteur à succès dans le monde arabe sous le coup d’un mandat d’arrêt du tribunal militaire libanais, Fadel Chaker est toujours en cavale après avoir pris la fuite suite aux violents affrontements de cet été qui ont opposé l’armée libanaise aux partisans du cheikh radical Ahmad Al-Assir.

Du micro à la kalachnikov en soutien à la rebellion syrienne

Machine à albums, il rencontre la gloire dans les années 1990 avec des chansons d’amour. Né d'un père libanais et d'une mère palestinienne, il militait pour les droits palestiniens. Il avait obtenu la citoyenneté d’honneur du président Mahmoud Abbas. Puis un jour, il est séduit par les prêches d’Adam el-Assir, un imam sunnite radical, et décide de mettre un terme à sa carrière au moment de la révolte contre le régime de Bachar al-Assad lancée en Syrie en mars 2011. Le Liban est alors une terre divisée par le conflit syrien entre le Hezbollah engagé aux cotés des hommes de Bachar al-Assad face aux rebelles syriens, en majorité sunnites, soutenus notamment par les partisans d’Adam el-Assir.

Se laissant poussé la barbe, Fadhel Chaker ne veut plus connaître les lumières de la scène et prendre le micro pour chanter considérant que c’est « haram », soit interdit par l’islam.

En mars 2012, le chanteur au physique de tombeur et à la voix chaleureuse s’affiche officiellement aux cotés de Admad el-Assir lors d’une marche de soutien aux rebelles syriens à Saïda, sa ville natale au sud du Liban. Le cheikh Assir est alors connu pour son hostilité au régime de Damas et au Hezbollah chiite libanais qui font usage des armes contre les rebelles syriens qui se battent aux cotés de l’armée de Bachar al-Assad.

Fin avril 2013, le cheikh Assir avait appelé au jihad en Syrie pour venir faire masse contre l’armée syrienne multipliée en nombre par le Hezbollah. En juin, lors du siège de la mosquée d’Ahmad el-Assir par l’armée libanaise qui faisait suite à des tirs sur un barrage de l’armée, Fadhel Chaker aidé des partisans du cheikh prend les armes, considéré comme une déclaration de guerre à l’armée libanaise et au Hezbollah. L’attaque coûte la vie à 17 soldats de l’armée libanaise.

Condamné à mort par coutumace pour « acte terroriste »

Après le siège sanglant dans la mosquée d’Abra, Fadhel Chaker devenu « Haj Fadhel » est reconnu sur une vidéo amateur postée sur YouTube où il affirme avoir tué deux soldats et blessés cinq autres. « Nous nous sommes débarrassés de vos deux porcs, de vos deux chiens. Dieu est grand ».

Depuis la prise par l’armée libanaise du QG de son mentor et les 124 mandats d’arrêt lancés par le tribunal militaire à l’encontre des insurgés, le chanteur libano-palestinien est en fuite. L’armée libanaise, aidée de tous les services de sécurité, est toujours à sa recherche. Surtout que le 8 juillet dernier, l’ancienne star de la chanson a été condamnée à la peine capitale par le tribunal militaire libanais.

Une chanson en l'honneur de Jésus Christ

Il n’avait donné aucun signe de vie depuis juin dernier. Mercredi, Fadel Chaker a mis en ligne une chanson de 4 minutes sur ses comptes Twitter et YouTube. « Le Messie est béni et nous sommes ses bien-aimés, il est porteur de la vraie religion ». Ce chant islamique loue le Christ à savoir que Jésus est considéré dans la religion musulmane comme un prophète de Dieu.

L’ex crooner a ensuite tweeté « On n’est pas un vrai musulman si l’on ne croit pas au Messie, que la paix soit avec Lui ».

La chanson a bien entendu provoquer de nombreuses réactions soit de soutien soit critiques à l’égard d’un homme engagé aux cotés de partisans armés. « Le christ pour lequel tu chantes a prêché pour la paix et l’amour, pas pour le meurtre ».