Place Tiananmen | Crédits Photo -- DR
Depuis la nomination l’an dernier du président Xi Jinping, la communauté internationale ne cesse de regarder vers la République Populaire de Chine alors que le ralentissement de la croissance de la 2e économie mondiale jette une ombre sur les économies du monde entier.
La curiosité était à son comble à la veille de la 3e séance plénière du 18e Congrès du Parti Communiste Chinois. Si les deux premiers plénums servent à définir les postes au sein du gouvernement, le 3e est traditionnellement celui où sont décidées les politiques et les stratégies pour la décennie à venir. La réunion de 2013 est d’autant plus cruciale qu’elle intervient à un moment critique de l’histoire du géant asiatique.
Accumulation massive de dettes dans les entreprises, banques et collectivités, chute de la productivité, grave crise environnementale et fortes tensions sociales menacent le modèle de croissance de la Chine. C’est d’ailleurs sur un triste préambule, rappelant l’urgence de la situation, que s’ouvrait le Congrès du PCC : l’attentat-suicide du 28 octobre perpétré par les minorités Ouïgours sur la symbolique place Tiananmen.
Pourtant l’espoir règne dans le pays depuis l’arrivée de Mr Xi. Nombreux sont les commentateurs politiques qui voient en lui la personnalité capable de redresser le pays en s’attaquant aux problèmes structurels, en réduisant la dépendance aux exportations et en luttant contre les inégalités sociales qui bloquent l’avènement de la fameuse « classe moyenne chinoise ». Sera-t-il pour autant le leader capable d’initier la libéralisation et la démocratisation du pays nécessaires à l’affirmation de la Chine comme puissance majeure sur le long-terme, selon la thèse du célèbre économiste Wu Jinglian ? C’est ce que le bilan du 3e Plénum devrait nous apprendre.
La curiosité était à son comble à la veille de la 3e séance plénière du 18e Congrès du Parti Communiste Chinois. Si les deux premiers plénums servent à définir les postes au sein du gouvernement, le 3e est traditionnellement celui où sont décidées les politiques et les stratégies pour la décennie à venir. La réunion de 2013 est d’autant plus cruciale qu’elle intervient à un moment critique de l’histoire du géant asiatique.
Accumulation massive de dettes dans les entreprises, banques et collectivités, chute de la productivité, grave crise environnementale et fortes tensions sociales menacent le modèle de croissance de la Chine. C’est d’ailleurs sur un triste préambule, rappelant l’urgence de la situation, que s’ouvrait le Congrès du PCC : l’attentat-suicide du 28 octobre perpétré par les minorités Ouïgours sur la symbolique place Tiananmen.
Pourtant l’espoir règne dans le pays depuis l’arrivée de Mr Xi. Nombreux sont les commentateurs politiques qui voient en lui la personnalité capable de redresser le pays en s’attaquant aux problèmes structurels, en réduisant la dépendance aux exportations et en luttant contre les inégalités sociales qui bloquent l’avènement de la fameuse « classe moyenne chinoise ». Sera-t-il pour autant le leader capable d’initier la libéralisation et la démocratisation du pays nécessaires à l’affirmation de la Chine comme puissance majeure sur le long-terme, selon la thèse du célèbre économiste Wu Jinglian ? C’est ce que le bilan du 3e Plénum devrait nous apprendre.
L’économie à droite, le politique à gauche
Les objectifs définis lors du Congrès sont nombreux et semblent pour la plupart ambitieux. Le grand dessin calligraphié par le PCC est la construction d’une « économie socialiste de marché », modernisée et protégée par une justice indépendante. Ce vaste et étonnant programme s’articule autour de la redéfinition des relations entre secteurs privé et public. Désormais, le rôle décisif du Marché est reconnu. Son implication dans la redistribution des ressources devient aussi primordiale que les interventions de l’Etat. Cette petite révolution s’accompagne d’une fiscalité moderne pour réduire l’endettement des collectivités locales et la création de marchés fonciers entre zones rurales et urbaines. Ces mesures illustrent une véritable prise de conscience du PCC quant aux inégalités territoriales qui fragilisent le pays et aux outils nécessaires pour y remédier efficacement.
Si l’économie est la clef de voûte du programme établi par le Plénum, des avancées sociales et politiques sont également à relever. Une sécurité sociale de base devrait être mise en place, accompagnée d’un assouplissement de la règle de l’enfant unique. Le système du hukou, ce passeport intérieur discriminatoire censé réguler l’exode rural, sera modernisé. Xi Jinping a également engagé une guerre totale contre la corruption, qui a notamment vu la chute de son frère idéologique et rival politique Bo Xilai. C’est la première étape vers une refonte du système juridique chinois et l’abolition de la rééducation par le travail, héritage de l’ère Mao qui symbolisait l’État policier en opposition à l’État de Droit.
Pourtant si l’économie se libéralise, le bilan politique est teinté de conservatisme. Le communiqué officiel du plénum rappelle que « l’objectif général reste […] d’améliorer le socialisme chinois ». Ainsi les mesures politiques et sociales du 3e Plénum ne répondent pas entièrement aux exigences du peuple. Elles ont bel et bien pour but principal d’assurer la survie d’un PCC de plus en plus controversé et d’asseoir la légitimité des dirigeants communistes. Il n’y a donc aucune preuve que des avancées démocratiques en ce qui concerne la tolérance envers les minorités ou les opposants au régime soient sur l’agenda de Pékin. Au contraire, chargé de mener une ambitieuse révolution économique, le président s’affirme avec beaucoup plus d’autoritarisme que son prédécesseur sur le plan politique.
Si l’économie est la clef de voûte du programme établi par le Plénum, des avancées sociales et politiques sont également à relever. Une sécurité sociale de base devrait être mise en place, accompagnée d’un assouplissement de la règle de l’enfant unique. Le système du hukou, ce passeport intérieur discriminatoire censé réguler l’exode rural, sera modernisé. Xi Jinping a également engagé une guerre totale contre la corruption, qui a notamment vu la chute de son frère idéologique et rival politique Bo Xilai. C’est la première étape vers une refonte du système juridique chinois et l’abolition de la rééducation par le travail, héritage de l’ère Mao qui symbolisait l’État policier en opposition à l’État de Droit.
Pourtant si l’économie se libéralise, le bilan politique est teinté de conservatisme. Le communiqué officiel du plénum rappelle que « l’objectif général reste […] d’améliorer le socialisme chinois ». Ainsi les mesures politiques et sociales du 3e Plénum ne répondent pas entièrement aux exigences du peuple. Elles ont bel et bien pour but principal d’assurer la survie d’un PCC de plus en plus controversé et d’asseoir la légitimité des dirigeants communistes. Il n’y a donc aucune preuve que des avancées démocratiques en ce qui concerne la tolérance envers les minorités ou les opposants au régime soient sur l’agenda de Pékin. Au contraire, chargé de mener une ambitieuse révolution économique, le président s’affirme avec beaucoup plus d’autoritarisme que son prédécesseur sur le plan politique.
Xi Jiping | Crédits Photo -- AFP
Une nouvelle Singapour, ou une véritable troisième voie ?
Bien que Xi Pinjing emploie à tour de bras le mot « réforme » dans ses discours, sa politique s’inscrit plutôt dans la lignée de celle menée en Chine depuis Deng Xiaoping. Le programme du PCC reprend plus ou moins la voie des « quatre modernisations » en oubliant à nouveau la 5e, celle de la démocratie. La devise du Petit Timonier pourrait presque être adaptée à la situation actuelle du pays : « Un pays, deux systèmes », un économique et un politique.
Ce mélange quasi schizophrénique de fort contrôle politique et de réformes économiques libérales rappelle d’ailleurs le profil actuel de Singapour. Le modèle de la Cité-Etat pourrait-il s’appliquer durablement à l’empire-continent ? Même si la démocratie singapourienne est loin d’être un modèle de vertu, il en découlerait quelques avantages. Il est indéniable que les libertés d’expression et d’opinion y sont davantage respectées. Mais, plus que l’envie de copier son florissant voisin, il semble que la volonté de Xi Jinping soit plutôt de museler le politique pour permettre à l’économique de se réformer en profondeur et dans le calme.
Xi Jinping est-il étonnamment lucide ou totalement aveuglé ? Peut-être un peu des deux. Il semble en tout cas obsédé par un certain syndrome Gorbatchev. Le président chinois a reconnu les nécessaires réformes économiques de grande envergure à prévoir pour redonner un souffle à sa nation. Mais, il ne souhaite pas répéter les erreurs de l’ex-URSS en engageant au même moment une réflexion sur le système politique et sur le parti en place. Cela risquerait de marquer la fin d’un PCC déjà fragilisé.
N’oublions pas que Xi Jinping est issu du parti des Princes : il est un enfant rouge des hauts dignitaires communistes. Il a sûrement profité de ce système d’où son intérêt à le conserver. Mais, il doit être également conscient que tout changement majeur à l’échelle de la Chine prend et que rien ne doit être précipité. La spécificité de la culture chinoise nécessite peut-être que l’ordre social y soit maintenu avec force pour encaisser des changements en profondeur. Loin des « modèles » occidentaux ou soviétiques, serait-ce enfin là le secret d’une troisième voie chinoise ?
Ce mélange quasi schizophrénique de fort contrôle politique et de réformes économiques libérales rappelle d’ailleurs le profil actuel de Singapour. Le modèle de la Cité-Etat pourrait-il s’appliquer durablement à l’empire-continent ? Même si la démocratie singapourienne est loin d’être un modèle de vertu, il en découlerait quelques avantages. Il est indéniable que les libertés d’expression et d’opinion y sont davantage respectées. Mais, plus que l’envie de copier son florissant voisin, il semble que la volonté de Xi Jinping soit plutôt de museler le politique pour permettre à l’économique de se réformer en profondeur et dans le calme.
Xi Jinping est-il étonnamment lucide ou totalement aveuglé ? Peut-être un peu des deux. Il semble en tout cas obsédé par un certain syndrome Gorbatchev. Le président chinois a reconnu les nécessaires réformes économiques de grande envergure à prévoir pour redonner un souffle à sa nation. Mais, il ne souhaite pas répéter les erreurs de l’ex-URSS en engageant au même moment une réflexion sur le système politique et sur le parti en place. Cela risquerait de marquer la fin d’un PCC déjà fragilisé.
N’oublions pas que Xi Jinping est issu du parti des Princes : il est un enfant rouge des hauts dignitaires communistes. Il a sûrement profité de ce système d’où son intérêt à le conserver. Mais, il doit être également conscient que tout changement majeur à l’échelle de la Chine prend et que rien ne doit être précipité. La spécificité de la culture chinoise nécessite peut-être que l’ordre social y soit maintenu avec force pour encaisser des changements en profondeur. Loin des « modèles » occidentaux ou soviétiques, serait-ce enfin là le secret d’une troisième voie chinoise ?
Rendez-vous avec Xi
Le 3e plénum a au moins eu le mérite de mettre à l’ordre du jour des mesures ambitieuses et nécessaires à la bonne santé économique et, espérons-le, sociale de la Chine à moyen-terme.
La route pour atteindre le « Chinese Dream » - la Chine comme puissance de premier plan dont parle XI Jinping - reste encore longue. Rappelons que le plénum n’a fixé que des objectifs directeurs et que le gouvernement doit désormais les mettre en pratique. Pour cela, il devra s’opposer à de nombreux intérêts particuliers ainsi qu’aux rouages complexes de la bureaucratie communiste. Tout dépend désormais de la personnalité de Xi Jinping et de sa capacité à s’imposer. Rendez-vous pris en 2020 pour faire le bilan.
La route pour atteindre le « Chinese Dream » - la Chine comme puissance de premier plan dont parle XI Jinping - reste encore longue. Rappelons que le plénum n’a fixé que des objectifs directeurs et que le gouvernement doit désormais les mettre en pratique. Pour cela, il devra s’opposer à de nombreux intérêts particuliers ainsi qu’aux rouages complexes de la bureaucratie communiste. Tout dépend désormais de la personnalité de Xi Jinping et de sa capacité à s’imposer. Rendez-vous pris en 2020 pour faire le bilan.