L'artiste et son modèle, un hommage à l'esthétisme.

9 Mars 2013


L'artiste et son modèle sort dans nos salles le mercredi 13 mars. Ce film, du réalisateur espagnol Fernando Trueba, est peut-être la dernière occasion de voir Jean Rochefort au cinéma. Mais c'est aussi et surtout un film réussi sur l'art, la vie et les artistes dans leur quête du sublime.


L'histoire se déroule non loin de la frontière espagnole, durant l'été 1943 dans une France occupée par les Allemands. Marc Cros (Jean Rochefort) est un artiste peintre et sa femme Léa (Claudia Cardinale) une ancienne modèle. Ils vivent une retraite paisible, mais ce quotidien monotone est bouleversé par l'arrivée de Mercé (Aida Folch). Cette jeune Espagnole échappée d’un camp de réfugiés va être hébergée par le couple et devenir la muse du vieil artiste, qui retrouve alors le goût du travail.

Pour le scénario, Fernando Trueba s'est entouré de Jean-Claude Carrière, à qui l'on doit entre autres le scénario de l'adaptation réussi de Syngué Sabourg - Pierre de patience, un film tiré du roman éponyme d'Atiq Rahimi. L'artiste et son modèle est un film sans couleur dans lequel le réalisateur nous raconte l'histoire d'un sculpteur face à ses doutes et ses angoisses, mais aussi d'un homme face au temps qui passe et à la vieillesse qui devient de plus en plus pesante. La relation ambiguë et exigeante entre l'artiste et le modèle n'est pas laissée de côté, et est également un ressort du récit.

Le réalisateur espagnol est un amoureux de l'art et des artistes. Il connait bien le sujet puisque son frère, à qui est dédié le film, était sculpteur. L'art est omniprésent tout au long du film, les références sont nombreuses et agréables. Il suffit de voir la scène très touchante dans laquelle l'artiste explique à son modèle une œuvre de Rembrandt pour comprendre cet amour et cette volonté de transmission.

Quant à la réalisation, elle est magnifique. Les plans sur la nature, sur les corps et sur les œuvres sont soignés et maîtrisés. Tout au long des 1h45 du film, la nudité est présente ; c'est cependant une nudité artistique loin du glauque et du voyeurisme. Le corps de la jeune actrice est montré sans artifice et tout comme les sculptures, est sublimé par le noir et blanc. Chose surprenante, c'est un film sans musique. Ce choix peut paraître étonnant mais encore une fois, on ressent la volonté de ne pas utiliser d'artifice, d'être au plus prêt du réel avec les bruits de la nature, de l'atelier mais aussi grâce aux silences.

Le casting est prestigieux et réussi. La belle Aida Floch tout comme son personnage se donne corps et âme dans son rôle de modèle. Jean Rochefort lui, est toujours juste et crève l'écran ; on espère qu'il sortira de se retraite pour d'autres projets aussi intéressants que celui-ci. Quand aux seconds rôles, ils sont eux aussi très captivants et touchants, c'est d'ailleurs avec plaisir qu'on retrouve Claudia Cardinale à l'écran.

Ce premier film tourné en langue française de Fernando Trueba est d'un esthétisme et d'une beauté rare. Avec ce casting trois étoiles et une pointe d'humour, le réalisateur rend hommage aux artistes et à la beauté de l'art tout en nous transmettant cette passion.




Astronaute, blogueur, esthète, amateur de cinéma, Don Draper du dimanche, animateur radio et bien… En savoir plus sur cet auteur