Crédits -- Marek Peters
Mélange de rejet total des principes de l’extrême-droite et de fascination dégoûtée à propos de l’histoire allemande, l’attention de la presse d'outre-Rhin quant au Parti national-démocrate, fondé en 1964 sur les ruines du Parti socialiste de l’empire (Sozialistische Reichspartei, SRP) et du Parti impérial allemand (Deutsche Reichspartei, DRP) a redoublé d’attention depuis deux ans. Fin 2011, l’affaire de la Clandestinité nationale-socialiste (Nationalsozialistischer Untergrund, NSU) éclate. Ce groupe terroriste, dont plusieurs membres sont décédés, est l’auteur d’une dizaine de meurtres sur de petits commerçants originaires de Turquie et de Grèce ainsi que sur une policière. Le procès de la criminelle restée en vie, Beate Zschäpe, et de quatre complices, met en lumière la proximité des tueurs avec la mouvance néo-nationale-socialiste, et probablement avec son représentant le plus important, le NPD.
Si le Parti national-démocrate déclare, sur son site officiel, « refuse[r] la violence comme moyen d’expression politique » et nie tout rapport avec les agissements de la NSU, la révélation des meurtres en série relance le débat sur une éventuelle interdiction de cette formation europhobe, raciste, antisémite et pangermaniste. Une telle procédure n’est pas inédite [le SRP a précisément été dissous en 1952, ainsi que le Parti communiste (KPD) quatre ans après, ndlr] mais présente de sérieuses difficultés, d’ordre politique et juridique. Concrètement, l’examen d’un tel dossier par les juges constitutionnels prend énormément de temps, ce qui accorderait une visibilité considérable au NPD – une tribune gratuite et légale, en somme, pour cette frange radicale du paysage politique allemand, qui rassemble environ 6 000 militants selon des sources officielles citées par l’expert Jean-Yves Camus.
Si le Parti national-démocrate déclare, sur son site officiel, « refuse[r] la violence comme moyen d’expression politique » et nie tout rapport avec les agissements de la NSU, la révélation des meurtres en série relance le débat sur une éventuelle interdiction de cette formation europhobe, raciste, antisémite et pangermaniste. Une telle procédure n’est pas inédite [le SRP a précisément été dissous en 1952, ainsi que le Parti communiste (KPD) quatre ans après, ndlr] mais présente de sérieuses difficultés, d’ordre politique et juridique. Concrètement, l’examen d’un tel dossier par les juges constitutionnels prend énormément de temps, ce qui accorderait une visibilité considérable au NPD – une tribune gratuite et légale, en somme, pour cette frange radicale du paysage politique allemand, qui rassemble environ 6 000 militants selon des sources officielles citées par l’expert Jean-Yves Camus.
Le NPD sera-t-il interdit un jour?
L’article 21 de la Loi fondamentale allemande (la Constitution) traite des partis politiques. Malgré sa rhétorique de prime abord ferme, son contenu laisse le champ libre à des interprétations plutôt diverses : « [...] Leur organisation interne doit être conforme aux principes démocratiques. [...] Les partis qui, d’après leurs buts ou d’après le comportement de leurs adhérents, tendent à porter atteinte à l’ordre constitutionnel libéral et démocratique, ou à le renverser, ou à mettre en péril l’existence de la République fédérale d’Allemagne, sont inconstitutionnels. La Cour constitutionnelle fédérale statue sur la question de l’inconstitutionnalité. » Toute la question réside dans le caractère direct de la menace envers la démocratie – à propos de laquelle la Cour européenne des droits de l’Homme a exprimé quelques doutes.
Crédits photo -- xtranews.de
En 2001, la triple demande d’interdiction lancée à la fois par le gouvernement, les deux Chambres du Parlement, le Bundestag et le Bundesrat, ainsi que la Cour constitutionnelle fédérale, avait traîné jusqu’en 2003 et s’était soldée par un rejet. Comme l’écrivait Anja Noster en janvier 2013, « la raison en fut l’infiltration à l’intérieur de sections […] régionales de cette formation par des informateurs de l’Office de protection de la constitution. Ainsi, la transparence et l’admissibilité de l’action en justice n’étaient plus garanties pour les juges, puisque la distinction n’était pas évidente entre les déclarations provenant de membres du NPD et celles livrées par des agents […] Tout le processus représenta une importante humiliation dans l’histoire de la démocratie allemande. »
Toutefois, à l’initiative des ministres-présidents [les dirigeants des seize Länder, ndlr], une nouvelle demande de dissolution du Parti national-démocrate est en cours. Elle a été déposée par le Bundesrat, qui souhaite cette fois éviter tout vice de procédure, mais s’avance jusqu’à comparer explicitement le NDP au NSDAP, le parti unique du régime hitlérien. Prudente, la chancelière Angela Merkel n’a pas l’intention de risquer un nouvel échec et s’est contentée de faire savoir, par l’intermédiaire d’un porte-parole, sa plus stricte condamnation de l’orientation et de l’activité du mouvement néonazi. La fin de ce véritable serpent de mer de la vie politique d’outre-Rhin n’est malheureusement pas pour demain.
La différence entre le Parti national-démocrate d’Allemagne et les formations que l’on considère fréquemment comme ses homologues dans d’autres pays est remarquable – le Front national en France, la Ligue du Nord en Italie, les Démocrates suédois, le FPÖ en Autriche ou l’Union démocratique du centre en Suisse. Contrairement à ces partis, le NPD n’a jamais été représenté que dans des assemblées régionales, et jamais au Bundestag. En revanche, même s’il doit jouer sur les mots pour adoucir son programme, ces subterfuges de façade ne trompent ni ses sympathisants ni ses opposants : le NPD est bien plus à droite et intransigeant sur ses « valeurs » quand à l’identité allemande et la haine des immigrés.
Toutefois, à l’initiative des ministres-présidents [les dirigeants des seize Länder, ndlr], une nouvelle demande de dissolution du Parti national-démocrate est en cours. Elle a été déposée par le Bundesrat, qui souhaite cette fois éviter tout vice de procédure, mais s’avance jusqu’à comparer explicitement le NDP au NSDAP, le parti unique du régime hitlérien. Prudente, la chancelière Angela Merkel n’a pas l’intention de risquer un nouvel échec et s’est contentée de faire savoir, par l’intermédiaire d’un porte-parole, sa plus stricte condamnation de l’orientation et de l’activité du mouvement néonazi. La fin de ce véritable serpent de mer de la vie politique d’outre-Rhin n’est malheureusement pas pour demain.
La différence entre le Parti national-démocrate d’Allemagne et les formations que l’on considère fréquemment comme ses homologues dans d’autres pays est remarquable – le Front national en France, la Ligue du Nord en Italie, les Démocrates suédois, le FPÖ en Autriche ou l’Union démocratique du centre en Suisse. Contrairement à ces partis, le NPD n’a jamais été représenté que dans des assemblées régionales, et jamais au Bundestag. En revanche, même s’il doit jouer sur les mots pour adoucir son programme, ces subterfuges de façade ne trompent ni ses sympathisants ni ses opposants : le NPD est bien plus à droite et intransigeant sur ses « valeurs » quand à l’identité allemande et la haine des immigrés.
Accusé d’être homosexuel, son chef démissionne
Ce contexte troublé se double maintenant d’une crise politique interne. Déjà au bord de la faillite depuis que deux décisions du Tribunal administratif de Berlin, en 2008 et 2009, l’ont condamné pour sa comptabilité irrégulière, le NPD se voit maintenant sans tête. Le 19 décembre dernier, les chaînes de télévision publiques ARD et NDR ont annoncé la démission de son président, Holger Apfel. Ce dernier, qui avait été élu à ce poste le 13 novembre 2011, a dans un premier temps avancé des raisons médicales pour expliquer son geste. Cinq jours plus tard, NDR révèle que son retrait serait plutôt du à des rumeurs quant à son homosexualité et à un comportement déplacé envers au moins un militant de sa formation politique, qu’Apfel quitte complètement afin d’éviter de devoir passer devant un comité d’exclusion.
Être gay n’est pas compatible avec le statut de membre du Parti national-démocrate d’Allemagne, dont les prises de positions s’orientent très clairement vers le refus de tout statut civil, avantage fiscal, ou reconnaissance des enfants aux couples de même sexe. Si rien n’est pour l’instant confirmé, l’homme de 42 ans, marié et trois fois père, laisse sa place en intérim au vice-président Udo Pastörs. Les observateurs de la vie politique allemande considèrent le dirigeant provisoire du NPD comme plus radical encore que son prédécesseur et en tout cas bien plus explicite quand à son admiration pour la pensée nazie, et notamment celle du ministre de la propagande Goebbels.
Son mandat devait durer jusqu’à l’automne 2014, mais les chances pour Pastörs de conserver la direction du parti sont toutefois minces, tout comme pour les deux autres suppléants Frank Schwerdt et Karl Richter. Le favori pour ce poste n’est autre qu’Udo Voigt, président du NPD de 1996 à 2011, et qui avait du laisser son fauteuil à Apfel à la suite d’une campagne interne. Toutefois, selon une analyse de la chaîne NDR, Voigt ne disposerait pas du soutien de l’ensemble des grandes figures locales de son mouvement d’extrême-droite.
Ses principaux chantiers seraient essentiellement la défense contre la procédure fédérale d’interdiction, le rétablissement des finances, la relance de l’alliance avec l’Union populaire allemande (Deutsche Volksunion, DVU – un autre parti xénophobe et nationaliste), la garantie des rares mandants, et la préparation des élections européennes. En ce qui concerne ces dernières, un nouveau parti a fait le choix de s’opposer à l’intégration européenne en présentant des arguments plus économiques que d’ordre raciste : l’Alternative pour l’Allemagne (Alternative für Deutschland, AfD), qui n’a pour le moment enregistré aucun succès. Quand à Apfel, il ne s’est pas encore exprimé sur les accusations d’abus envers un collaborateur d’une vingtaine d’années lors de la dernière campagne législative et les moqueries fréquentes sur sa richesse, son apparence physique et son élocution. Il déclare vouloir tout de même conserver son mandat de député régional en Saxe.
Être gay n’est pas compatible avec le statut de membre du Parti national-démocrate d’Allemagne, dont les prises de positions s’orientent très clairement vers le refus de tout statut civil, avantage fiscal, ou reconnaissance des enfants aux couples de même sexe. Si rien n’est pour l’instant confirmé, l’homme de 42 ans, marié et trois fois père, laisse sa place en intérim au vice-président Udo Pastörs. Les observateurs de la vie politique allemande considèrent le dirigeant provisoire du NPD comme plus radical encore que son prédécesseur et en tout cas bien plus explicite quand à son admiration pour la pensée nazie, et notamment celle du ministre de la propagande Goebbels.
Son mandat devait durer jusqu’à l’automne 2014, mais les chances pour Pastörs de conserver la direction du parti sont toutefois minces, tout comme pour les deux autres suppléants Frank Schwerdt et Karl Richter. Le favori pour ce poste n’est autre qu’Udo Voigt, président du NPD de 1996 à 2011, et qui avait du laisser son fauteuil à Apfel à la suite d’une campagne interne. Toutefois, selon une analyse de la chaîne NDR, Voigt ne disposerait pas du soutien de l’ensemble des grandes figures locales de son mouvement d’extrême-droite.
Ses principaux chantiers seraient essentiellement la défense contre la procédure fédérale d’interdiction, le rétablissement des finances, la relance de l’alliance avec l’Union populaire allemande (Deutsche Volksunion, DVU – un autre parti xénophobe et nationaliste), la garantie des rares mandants, et la préparation des élections européennes. En ce qui concerne ces dernières, un nouveau parti a fait le choix de s’opposer à l’intégration européenne en présentant des arguments plus économiques que d’ordre raciste : l’Alternative pour l’Allemagne (Alternative für Deutschland, AfD), qui n’a pour le moment enregistré aucun succès. Quand à Apfel, il ne s’est pas encore exprimé sur les accusations d’abus envers un collaborateur d’une vingtaine d’années lors de la dernière campagne législative et les moqueries fréquentes sur sa richesse, son apparence physique et son élocution. Il déclare vouloir tout de même conserver son mandat de député régional en Saxe.