L’Allemagne partage ses neuf frontières avec d’autres pays européens. Angela Merkel a compris l’importance d’une politique européenne pour ce pays situé au carrefour de l’Europe et perçu après les deux Guerres mondiales comme un envahisseur potentiel. En sept ans, elle a fait passer l’Allemagne du statut de géant économique endormi à celui de leader politique de l’Europe. Sa politique européenne assoit sa légitimité et lui permet de faire preuve d’une autorité appréciée par les citoyens allemands.
Au secours des « cigales » de l’Europe
Une autorité qui s’affirme avant tout dans le domaine de l’économie : dépasser la crise de l’euro, si besoin par des moyens politiques, telle est la ligne adoptée par la coalition libérale-conservatrice au pouvoir. Au risque de mettre en place une politique d’austérité très impopulaire dans le reste de l’UE.
Angela Merkel, qui annonçait le 17 décembre au Financial Times que « l’Europe ne doit pas relâcher ses efforts », n’hésite pas à présenter le social en se fondant sur des chiffres, davantage que sur de l’humain. Elle rappelle dans cette même interview que l’Europe représente 7% de la population mondiale pour 50% des dépenses sociales du monde.
La presse populaire, notamment le tabloïd Das Bild, et l’opinion publique sont très remontées contre les « PIGS » (Portugal, Irlande, Grèce et Espagne), pays sans discipline fiscale et à l’activité économique irrégulière. Du fait d’un PIB élevé, les citoyens allemands financent en effet près de 20% du budget de l’UE. Ils souhaitent en conséquence avoir un droit de regard sur les dépenses de l’Europe, principalement sur les plans d’aide aux pays en difficulté.
Vers un fédéralisme européen ?
Un projet européen plus fédéraliste est en conséquence dessiné par la chancelière, pour laquelle l’intégration politique est nécessaire pour venir à bout de la crise de l’euro. Elle ne serait pas contre une intervention des instances européennes dans le budget des Etats. Une coordination accrue des politiques publiques jusqu’alors réservée à la souveraineté nationale (comme le droit du travail ou l’application de l’impôt) est également proposée par Angela Merkel.
La chancelière va jusqu’à évoquer un véritable gouvernement européen chapeauté par la Commission européenne. Deux chambres, issues du Parlement européen et du Conseil de l’UE, contrôleraient les décisions prises. Un modèle fédéral qui n’est pas sans rappeler le système politique des Etats-Unis, mais qui gêne la Cour constitutionnelle de Karlsruhe : ses juges ont rappelé à plusieurs reprises que l’on ne peut pas céder trop de souveraineté nationale à l’UE.
Un nouveau cap semble avoir été fixé à la conférence de Hanovre, après laquelle Angela Merkel a été reconduite à la tête de son parti le 4 décembre dernier. Seules huit minutes de l’intervention de la chancelière ont été consacrées à l’Europe, et les observateurs pointilleux n’ont pas pu s’empêcher de noter que le drapeau allemand installé derrière l’oratrice était plus grand que le drapeau européen. La chancelière semble revenir à une politique des « petits pas » et de pragmatisme, alors que les sommets européens essuient des échecs à répétition.