Crédit : DR
Vous avez sûrement entendu parler des gangs de motards américains, dont les plus connus sont les Hells Angels et les Bandidos, de véritables organisations créées après la Seconde Guerre mondiale et présentes aujourd’hui jusqu’en Europe. Ces gangs sont souvent surnommés club 1 %, une expression apparue à la suite des émeutes de Hollister en 1947, après que l’American Motorcyclist Association (AMA) déclarait que 99 % des motocyclistes étaient des citoyens respectueux des lois, et que le 1% restant ne l’étaient pas.
En revanche, un nombre plus réduit de personnes savent qu’en Nouvelle-Zélande existe une culture des gangs bien établie. L’un de ces gangs, les Mighty Mongrel Mob (Bande de bâtards), est né dans les années 60 sur la côte Est néozélandaise, à Hawkes Bay et se laisse très rarement approcher par les médias. Leurs activités se résument au trafic de drogue et à la violence en général. Les tatouages et les styles vestimentaires sont des signes distinctifs chez les gangs, exprimant dans le cas des Mighty Mob leurs origines maorie et anglo-saxonne.
Une série de photos unique
«Ils ont compris que je voulais faire un truc honnête et plus complexe qu’une carte postale culturelle». Ces clichés sont l’œuvre de Jono Rotman, un photographe natif de Wellington (travaillant aujourd’hui à New York) qui aurait passé 8 ans dans le quotidien des Mighty Mongrel Mob, et aurait réalisé environ 200 portraits uniques. Les tirages grand formats font actuellement l’objet d’une exposition à la City Gallery de Wellington mais ont déjà fait parler d’eux lors de la toute première exposition en 2014 à Auckland, pour avoir mis en valeur un portrait d’un Mongrel Mob accusé de meurtre.
Un regard différent
Crédits Denimz Rogue
Jono Rotman déclarait ces mots pour Vice le 29 mai 2015, dans une interview accompagnée des clichés du photographe. L’interview de Vice s’est intéressé à la façon dont Jono Rotman a organisé sa démarche pour approcher le gang, aux émotions qu’il a ressenties, et à sa première rencontre. Le photographe donne également des détails sur la façon de vivre des Mongrel Mob, ou encore sur le fait qu’ils ont tous une personnalité spéciale. Pour finir, il donne ses impressions, ce qu’il a retenu des huit années passées avec le gang.
« Ça a un peu changé mon regard sur la Nouvelle-Zélande – certains de ces types viennent de familles très pauvres et d’environnements difficiles. Ça m’a beaucoup aidé à comprendre mon pays. Je sais qu’on ne rejoint pas un gang par hasard – et encore moins quand on a accès à de bonnes écoles et tout ce genre de trucs. C’est aussi une plongée dans les forces qui ont fait de la Nouvelle-Zélande ce qu’elle est aujourd’hui. »
Une démarche artistique
Afin de pouvoir faire sa série de clichés, Jono Rotman a dû expliquer sa démarche aux Mongrel Mob et prendre quelques précautions. En effet, il leur a proposé une approche artistique et non journalistique, c’est à dire tirer des « portraits de guerre » plutôt que de « raconter leur histoire ». De plus, l’intégralité des clichés a été effectuée dans des ambiances neutres, bannissant tout élément relatif au temps ou à l’espace.
« En tant qu’artiste, je m’intéresse aux distillations de la condition humaine, et pour moi, les gangs représentent toute une palette de désirs humains poussés à l’extrême. Ils ont une certaine pureté. C’est ce que je voulais explorer, et c’est toujours l’objet de mon travail. »
Un gang de motards ? Pas vraiment, mais un gang oui !
Une des particularités des Mighty Mob : ils ne roulent pas à moto ! En effet, selon Jono Rotman, ils conduisent des Ford Classic V8 baptisées Henries. Le photographe confiera également une anecdote à propos d’unmemorial run, une sorte de road-trip à travers le pays pour rendre visite aux membres défunts.
Notre convoi de 30 voitures devait traverser un village dans le territoire des Black Power. Les mecs du Black Power ont dû voir les premières voitures patchées entrer dans le village et ont passé le mot à d’autres mecs. Quand on est arrivés, une demi-douzaine de types armés de briques et de battes de baseball sont sortis de leurs cachettes et ont commencé à se jeter sur les voitures. Et de plus en plus de voitures du Mob se sont pointées. Ça a dégénéré en baston générale au milieu de la rue principale. Heureusement, le chef du Mob est arrivé et les a stoppés. Ça se serait terminé en bain de sang sinon, vu que les Blacks étaient en infériorité numérique.
En 2011, une affaire est liée aux Mighty Mob et aux Black Power. À l’issue d’un match de championnat de rugby à Wairoa, les Mongrel Mobs ont sorti un fusil à canon scié et tiré en l’air, créant un vent de panique dans le public à dominante familiale. Aucun blessé à déplorer, mais l’incident semble avoir été provoqué par la présence dans les tribunes des Black Power. Et pourtant, Wairoa n’est qu’une ville de 4 000 habitants seulement. Régulièrement des incidents entre les deux gangs interviennent dans les grandes villes, mais aussi dans les endroits plus reculés, témoignant de l’ancrage de la culture des gangs en Nouvelle-Zélande.
Voici une vidéo amateur (en anglais) de funérailles d’un membre des Mongrel Mob :
Voici une vidéo amateur (en anglais) de funérailles d’un membre des Mongrel Mob :
Article publié à l'origine sur le CitizenPost, partenaire du Journal International.