L'AFL Grand Final 2014, entre les Hawthorn Hawks, en jaune et noir, et les Sydney Swans, en rouge et blanc - Crédit Getty Images
Dimanche 1er novembre 2015, à Twickenham, les Australiens se sont sévèrement inclinés avec un score de 34–17 en finale de la coupe du monde de rugby. Un résultat flatteur pour leurs adversaires néo-zélandais, qui ne menaient que de 4 points à quinze minutes de la fin du match, mais qui ont su faire la différence dans le money-time.
Un joueur australien a particulièrement fait parler de lui durant ce tournoi : Israel Follau. Et pour cause, l'arrière des Wallabies a déjà été joueur professionnel de rugby à XIII ainsi que de football australien, avant de finalement s’orienter avec succès vers le ruby à XV à l'âge de 24 ans. Malgré son efficacité toute relative durant cette campagne britannique (aucun essai durant le tournoi), les observateurs du monde de l’ovalie avaient salué les qualités d'athlète de ce joueur issu du monde de l'Australian football, un sport où l’agilité est un attribut essentiel.
Un sport aux influences multiples
Dans son ouvrage A Game of Our Own, l’historien Geoffrey Blainey retrace l'histoire du football australien, de sa création jusqu’à aujourd’hui. Plusieurs théories s’opposaient quant à l’origine de ce sport. Certains y voyaient un sport d’origine aborigène, d’autres un dérivé du football gaélique, mais c’est la troisième hypothèse que les historiens sont parvenus à authentifier : celle de sa création par un joueur de cricket australien.
Petit fils d'un criminel britannique condamné à l’exil en Australie, Tom Wills est ainsi considéré comme l'inventeur du football australien. Il a été largement influencé par la culture anglaise dans la conception de cette nouvelle pratique. Faisant le chemin inverse à celui de son grand père, c’est en effet lors de ses études en Angleterre que va germer en lui la création de sa version du football.
Brillant joueur de cricket, il rentre en Australie en 1856 et continue à y pratiquer ce sport, se distinguant comme l’un des meilleurs joueurs du pays. Le 10 juillet 1858, souhaitant continuer à pratiquer une activité physique après la fin de la saison de cricket, il rédige une lettre ouverte au Bell's Life in Victoria, un journal régional, réclamant la création d'un code de règles de football ainsi que la création d’équipes, dans le but de maintenir les joueurs de crickets « en forme pendant l’hiver austral ».
Tom Wills, reconnaissable à sa casquette, debout au second rang, entouré des aborigènes qui composaient son équipe de cricket – Crédit Wikimedia Commons
Un premier hiver d'expérimentation anarchique aura lieu. Dans son ouvrage, Blainey tente de restituer la confusion des premières parties en analysant des articles d’époque : « les Anglais jouaient au rugby, les Écossais faisaient n'importe quoi et les Irlandais tiraient le ballon en l'air et criaient ». C’est en 1859 que Tom Wills rédigera finalement lui-même un premier code de règles au Melbourne Cricket Club, illustration d’un compromis entre ces diverses influences. Le football australien est né.
Les règles du sport ont pourtant longtemps varié d'une région à l'autre, et leur harmonisation ne s’est faite que progressivement. On pourrait définir le football australien comme un mélange de rugby et de football, joué sur un terrain aux dimensions cependant bien plus importantes que les sports majeurs.
Deux équipes de 18 joueurs s’affrontent et ont pour objectif d'envoyer par un coup de pied un ballon de cuir ovale, semblable à celui utilisé au rugby, entre deux poteaux de buts. Les joueurs peuvent courir balle en main, à condition de faire rebondir le ballon. Ils peuvent se faire des passes, vers l’avant ou l’arrière, mais uniquement en frappant le ballon du poing, ou alors tenter des passes au pied. Si un joueur parvient à réceptionner une passe au pied sans que le ballon ne rebondisse, le jeu s’arrête, et le receveur peut choisir de tenter de marquer, ou alors repartir sans être gêné par ses adversaires Ces séquences, appelées “marks” donnent lieu à d'intenses duels aériens, les joueurs pouvant sauter à une hauteur de plus d'un mètre cinquante, et s’appuyer sur leurs adversaires pour aller le plus haut possible.
Un sport impossible à exporter
Le football australien jouit aujourd’hui d'une très grande popularité dans son pays d'origine, où il est considéré comme le sport majeur à l’Est et au Sud du pays. Il est notamment le sport roi de l'Etat de Victoria, où siègent dix des dix-huit équipes de l'Australian Football League. Cette compétition, générant des millions de dollars, est organisée à la manière des championnats américains - une saison régulière suivie de playoffs - et voit s'affronter ces 18 équipes dans des stades pouvant contenir jusqu'à 100 000 spectateurs.
Mais malgré son succès dans son pays d’origine, le football australien connaît les plus grandes difficultés à s'exporter. Au-delà des frontières du pays, il est en effet rare de trouver des amateurs de la discipline. Pire, aucun autre pays au monde ne pratique ce sport au niveau professionnel. Il n’existe pas d’autres fédérations nationales, et les pays dans lesquels l’Australian Football est pratiqué - en Asie et dans les Iles du Pacifique principalement - bénéficient d’une affiliation à l’AFL.
Une compétition internationale existe tout de même, malgré l’intérêt fort relatif qu’elle suscite. Depuis 2002, l’Australien Football International Cup se tient tous les trois ans. Ce tournoi est l’unique compétition ouverte à tous les pays. Seule l’Irlande et la Papouasie-Nouvelle-Guinée ont à ce jour inscrit leur nom au palmarès du tournoi, l’Australie, pays organisateur, n’étant pas représenté.
L’Australian Rules Football, plus qu’un sport national, reste une tradition propre au pays des kangourous. Fidèle à la coutume, l’Australian Football League continue à avoir lieu durant l'hiver austral, de mars à septembre dans l'hémisphère sud. L'an prochain, les Hawthorn Hawks remettent leur titre en jeu après avoir remporté les trois dernières éditions de la compétition.