Crédits photo -- Arthur Cerf/Le Journal International
Fondée en 1866, Stellenbosch est la deuxième plus vieille université du pays. Elle est rapidement devenue l’un des principaux foyers de la culture afrikaner après qu’un séminaire protestant y est été constitué en 1863. Plantée au milieu des montagnes, des vignobles et des maisons au style Cape Dutch, l’université de Stellenbosch a été le creuset des idées nationalistes afrikaners, au cours du XXème siècle.
Hendrik Verwoerd, Andries Treurnicht ou encore James B. Hertzog, pour ne mentionner que quelques uns des pères du nationalisme afrikaner et de l’apartheid, figurent dans la liste des étudiants renommés de l’université. Vingt ans après l’abolition d’un des régimes les plus violents de l’histoire du XXe siècle, l’université a changé, mais elle permet aujourd’hui d’éclairer de façon frappante l’ombre de l’apartheid qui plane encore sur l’Afrique du Sud.
Hendrik Verwoerd, Andries Treurnicht ou encore James B. Hertzog, pour ne mentionner que quelques uns des pères du nationalisme afrikaner et de l’apartheid, figurent dans la liste des étudiants renommés de l’université. Vingt ans après l’abolition d’un des régimes les plus violents de l’histoire du XXe siècle, l’université a changé, mais elle permet aujourd’hui d’éclairer de façon frappante l’ombre de l’apartheid qui plane encore sur l’Afrique du Sud.
L’université a évolué et insiste aujourd’hui sur son excellence académique dans les domaines de l’innovation, de la recherche et du développement durable. Le Hope Project et la Sustainability Institute, fondée en 1999, sont les nouveaux fers de lance d’un établissement qui se targue de son classement au Times Higher Education University World Rankings, classement prônant l’innovation et la recherche. L’université veut aussi mettre en avant la part importante de ses chercheurs membres de la South Africa’s National Research Fundation, agence intermédiaire entre la recherche et les politiques gouvernementales.
La seconde force de l’université est, sans doute, d’avoir remarquablement relevé les défis de la mondialisation en multipliant les partenariats internationaux avec les Etats-Unis et l’Europe : les étudiants internationaux représentent aujourd’hui plus de 10 % de la communauté étudiante de Stellenbosch. Si l’université a ainsi balayé sa proximité historique avec le régime de l’apartheid, elle porte néanmoins les stigmates profonds de ce système ségrégationniste et révèle, à la lumière de son conservatisme, la complexité des défis auxquels l’Afrique du Sud post-apartheid est aujourd’hui confrontée.
La seconde force de l’université est, sans doute, d’avoir remarquablement relevé les défis de la mondialisation en multipliant les partenariats internationaux avec les Etats-Unis et l’Europe : les étudiants internationaux représentent aujourd’hui plus de 10 % de la communauté étudiante de Stellenbosch. Si l’université a ainsi balayé sa proximité historique avec le régime de l’apartheid, elle porte néanmoins les stigmates profonds de ce système ségrégationniste et révèle, à la lumière de son conservatisme, la complexité des défis auxquels l’Afrique du Sud post-apartheid est aujourd’hui confrontée.
Afrikaans avant tout
Si la croissance du nombre d’étudiants coloureds et noirs témoigne de la mutation lente d’un schéma de recrutement, de plus en plus soumis à des quotas et à l’Affirmative Action, les Blancs représentent aujourd’hui encore près de 70% de la population étudiante de Stellenbosch. Une part énorme quand on sait que les Blancs ne représentent même pas un dixième de la population sud-africaine. Toutefois, c’est davantage au niveau de la politique linguistique de l’université que la violence du conservatisme s’exprime. Stellenbosch University est le seul établissement d’Afrique du Sud à conserver une part dominante de son enseignement en langue afrikaans.
Selon l’université, 60% des étudiants ont l’afrikaans pour langue maternelle, 33% l’anglais. Hors de question donc de dispenser tous les cours en anglais et ce, même si tous les étudiants afrikaners parlent et écrivent parfaitement en anglais. Le schéma linguistique de l’établissement apparaît, dès lors, relever d’un l’immobilisme quasi-absurde. Et pour ne pas trahir sa démarche évolutive, l’université opte de plus en plus pour la cohabitation linguistique : les cours en « T option » sont fréquents : dispensés une semaine sur deux en anglais, ils offrent la possibilité aux étudiants de rendre les devoirs en afrikaans ou en anglais. Lors d’un cours en amphithéâtre, des écouteurs sont distribués pour comprendre les propos du professeur traduits en direct par deux étudiants bilingues.
Selon l’université, 60% des étudiants ont l’afrikaans pour langue maternelle, 33% l’anglais. Hors de question donc de dispenser tous les cours en anglais et ce, même si tous les étudiants afrikaners parlent et écrivent parfaitement en anglais. Le schéma linguistique de l’établissement apparaît, dès lors, relever d’un l’immobilisme quasi-absurde. Et pour ne pas trahir sa démarche évolutive, l’université opte de plus en plus pour la cohabitation linguistique : les cours en « T option » sont fréquents : dispensés une semaine sur deux en anglais, ils offrent la possibilité aux étudiants de rendre les devoirs en afrikaans ou en anglais. Lors d’un cours en amphithéâtre, des écouteurs sont distribués pour comprendre les propos du professeur traduits en direct par deux étudiants bilingues.
Préserver une culture
Cet exemple, édifiant pour un Européen, permet de comprendre la complexité de la cohabitation des cultures au sein d’un pays qui ne compte pas moins de 11 langues officielles. Car, au delà de ce conservatisme apparent, la politique linguistique de Stellenbosch renseigne également sur les mécanismes de lutte pour la survie d’une culture. Pour Melinda, étudiante afrikaner « ça se comprend, si on cesse d’enseigner en afrikaans, les gens ne parleront plus l’afrikaans et c’est toute une culture qui disparaîtra ». Il y aurait donc, derrière l’apparence d’un conservatisme borné, la volonté de maintenir en vie une histoire. On aurait donc affaire à une micro-résistance culturelle face au risque de dilution des parties dans un tout anglophone.
Un schéma violent dans l'ombre de l'apartheid
Ce schéma, noyé dans la peur de la disparition de la culture afrikaner, exclut et révèle à lui-seul la pérennité des discriminations dans l’Afrique du Sud post-apartheid. Il exclut d’abord les 2% d’étudiants ayant le Xhosa, deuxième langue du pays, comme langue maternelle. Dans le train pour Cape Town, je rencontre Lumko, étudiant à Stellenbosch, qui fait partie de ces exclus. Il me parle du « racisme de l’université dans la manière qu’ils ont de traiter les Noirs ». Incapable de comprendre les cours en afrikaans, il souhaite quitter Stellenbosch et intégrer l’université de Cape Town. La politique linguistique de l’université maintient donc, dans une certaine mesure, la population noire et non afrikaner à distance, et perpétue ainsi des discriminations héritées de l’apartheid. Elle crée des inégalités violentes dans l’accession à l’excellence académique dont se vante l’université de Stellenbosch.
Si dire que l’Afrique du Sud est encore marquée par l’apartheid revient à enfoncer une porte ouverte, il est important de cerner les mécanismes institutionnels qui perpétuent les discriminations sud-africaines. D’autant plus qu’à ce schéma universitaire s’ajoutent le conservatisme et parfois le racisme de certains étudiants : il faut peu de temps à Stellenbosch pour comprendre que l’université et la ville demeurent un bastion afrikaner dont l’évolution est encore très relative.
Si dire que l’Afrique du Sud est encore marquée par l’apartheid revient à enfoncer une porte ouverte, il est important de cerner les mécanismes institutionnels qui perpétuent les discriminations sud-africaines. D’autant plus qu’à ce schéma universitaire s’ajoutent le conservatisme et parfois le racisme de certains étudiants : il faut peu de temps à Stellenbosch pour comprendre que l’université et la ville demeurent un bastion afrikaner dont l’évolution est encore très relative.